La résistance à Artignosc
pour commander ce livre : bon de commande Clandestinité et réseau républicain dans le Haut-Var. La société secrète montagnarde d’Artignosc (1849-1851) par Frédéric Négrel
La résistance au coup d’Etat du 2 décembre 1851à Artignosc
La résistance au coup d’Etat à Artignosc n’offre aucun événement remarquable. Artignosc n’est qu’une des 89 communes varoises à avoir participé à cette résistance[1]. Comme ailleurs, on fait la farandole ; comme dans 60 de ces communes, on renverse la municipalité[2]; comme des milliers de Varois, les Républicains artignoscais se mettent en marche pour défendre la Constitution.
Si nous étudions dans le détail les événements d’Artignosc, c’est pour tenter d’y découvrir le rôle que la société secrète et ses affiliés ont pu y jouer, et comment le réseau républicain a fonctionné pour réussir à mobiliser ces paysans et ces artisans bien éloignés des centres urbains, jusqu’alors théâtres exclusifs des actions politiques de portée nationale.
Nous touchons là le cœur du débat historique au sujet de ces sociétés secrètes dont l’action est soit minimisée, depuis Eugène Ténot[3], par bon nombre d’historiens républicains tels Iouda Tchernoff[4], Charles Seignobos[5] ou Maurice Agulhon[6], soit mise en avant, sinon dans la structuration du parti républicain, du moins dans la diffusion du mouvement et la participation à Décembre, par d’autres historiens non moins républicains, tel Philippe Vigier[7], Alain Corbin[8] ou Raymond Huard[9]. Cette étude ne prétend pas apporter de contribution définitive à ce débat, mais simplement l’éclairer par cet exemple local pris dans le détail.[10]
4.1 Le temps des émissaires
La résistance a débuté le 6 décembre à Artignosc. Cette révolte contre le viol de la Constitution, contre « l’assassinat de la République », tient en effet plus de la résistance que de l’insurrection, terme souvent employé pour décrire les mêmes événements.
« Légaliste par sa finalité et révolutionnaire par sa méthode »[11], cette résistance a 2 objectifs : défendre la République, c’est à dire surtout défendre la possibilité de la transformer en une République démocratique et sociale, « La Bonne » ou « La Belle », celle que les Républicains de 1851 espéraient tant faire sortir des urnes d’avril et mai 1852 ; le second objectif, plus insurrectionnel, c’est permettre « au Peuple de reprendre ses droits », ceux qui, à Moissac , devaient « améliorer la position du pauvre cultivateur », et qui, à Artignosc, devaient permettre de se partager les communaux et de rouvrir la chambrée (ce qu’on fera durant ces journées, comme à Sillans[12] ), fermée par la répression antirépublicaine du préfet, quelques mois plus tôt. « La répression policière et judiciaire avait perpétré dans les départements des dizaines de petits coups d’Etat locaux, contre lesquels on attendait le signal de revanche. »[13] C’est ce signal que l’on apporte à Artignosc.
Ce samedi 6 décembre, à 4 ou 5h du matin, des émissaires, que le maire dit venus d’Aups , mais qui sont en fait de Baudinard [14], frappent à la porte des maréchaux-ferrants, Antoine et Louis Pellegrin, et leur demandent de s’emparer de l’Hôtel de Ville. Ordre reçu : « Il n’y a pas moyen de reculer. Il faut partir. » Partir, cela signifie rassembler les Républicains et se rendre à Draguignan , via Salernes . D’après Marc Gérard, le médecin de Bauduen , cet ordre disait qu’on devait se rendre à Draguignan pour libérer les prisonniers de la Garde-Freinet [15].
A-t-on reçu d’autres ordres à Artignosc ? Il semble que la veille 5 décembre, la société de Barjols ait envoyé un message appelant au départ. Les Républicains de Bauduen disent l’avoir reçu via Baudinard où un Artignoscais[16] l’aurait apporté. Nous n’avons d’autre trace d’un tel message. Si Artignosc l’a effectivement reçu, il devait être peu précis puisque c’est bien vers Aups que les Artignoscais vont marcher et non vers Barjols, pourtant plus influente mais qui n’a envoyé d’ordre de départ à Montmeyan que le matin du dimanche 7. Plus certainement, il n’est pas venu de consigne des Basses-Alpes. Malgré les liens étroits et les parrainages entre les deux rives du Verdon, la lettre circulaire que Francoul et Buisson envoient le vendredi 5 de Manosque vers Riez , Quinson , Moustiers , Montagnac , Ste Croix et Allemagne [17], ne concerne pas la rive gauche. On raisonne clairement en entité départementale : le découpage administratif commande les routes de la résistance; les Varois iront à Draguignan , les Bas-Alpins à Digne .[18]
A Salernes , les délégués de plusieurs sociétés secrètes s’étaient réunis le soir du 5 décembre : « La République démocratique et sociale est arrivée. » Personne n’y représentait Artignosc. Mais il y avait là les chefs de la société d’Aups [19] qui avaient reçu le jour même une lettre de Paul Cotte, président de la société de Salernes, futur préfet du Var du 4 septembre 1870 et député radical[20].
A Salernes , lorsqu’on apprend la nouvelle du coup d’Etat, le 4 décembre, la farandole qui agite les rues de la petite ville est plutôt joyeuse : l’annonce de l’abolition de la loi du 31 mai, et le rétablissement du « vote universel » qu’elle implique, semble avoir eu l’effet escompté par Louis Napoléon Bonaparte. Il faut la maîtrise politique d’Ignace Renoux, conseiller général et véritable leader du parti républicain salernois, pour déjouer la démagogie bonapartiste. Il se rend le lendemain vendredi 5, à Draguignan au Café Alter où se réunit le comité démocratique. Il y rencontre Honoré Pastoret, l’ancien adversaire du préfet Hausmann, qui prêche le calme. Mais les arguments en faveur du soulèvement doivent alors être les plus forts et la lettre qu’il fait porter à Salernes appelle aux armes et à la marche sur Draguignan.
De retour de cette réunion, les chefs aupsois réunissent les affiliés à la chambrée des « Escaraïré »[21]. Ils mettent sur pied un guet-apens pour intercepter le courrier sur la route de Villecroze. On ramène les dépêches à la chambrée pour les lire. Certains n’y comprennent rien : elles sont en français ! Vers minuit, Isoard envoie[22] porter l’ordre de partir à Moissac et Baudinard . Le président de Moissac[23] devait faire suivre à Régusse et Baudinard[24] à Bauduen . Nous avons ce message[25] écrit : « Le président de la société d’Aups invite son cantonnement à prendre les armes et à se rendre à Aups vers les 2 heures. signé : Jean-Baptiste Isoard. » Le « cantonnement » est ici surprenant car nous avons vu que les sociétés secrètes de cette région du Var ne possédaient pas d’organisation supra-communale, les tentatives de l’été 1851 ayant échoué. Isoard s’improvise là chef cantonal.
Les Républicains de Baudinard ont donc élargi leur transmission en envoyant ces deux messagers chez leurs voisins artignoscais qu’ils fréquentaient souvent.
De son côté, la société de Bauduen porte un billet aux Salles [26] qui lui-même le répercute à Aiguines .
On ne sait quand Artignosc a appris les nouvelles du coup d’Etat. Certainement peu de temps après le maire de Régusse , le notaire Célestin Gariel, qui prit connaissance le 4 décembre[27] de la première dépêche du télégraphe optique arrivée à Toulon de Paris.
« Partout où la propagande républicaine avait pénétré, elle avait fait connaître jusqu’au fin fond des villages l’article 68 et l’article 110[28] de la Constitution, en vertu desquels la nouvelle du coup d’Etat serait ipso facto un signal d’insurrection »[29]. Et les Républicains d’Artignosc étaient prêts. Comme tous leurs compatriotes, et en particulier ceux qui avaient été touchés par la propagande républicaine, avant d’eux-mêmes la diffuser, ils savaient que le coup d’Etat était dans l’air. La presse, républicaine ou conservatrice, annonçait son imminence depuis octobre.
Ce signal de résistance, ce n’est pas un comité central qui l’envoie, ni de Paris, ni des capitales régionales : les Montagnards parisiens, sans leader ni coordination, ne se préoccupent pas de la province; à Marseille et à Toulon , les chefs sont arrêtés[30]; on recommande à l’émissaire dracénois envoyé à Marseille de ne pas bouger. C’est cette position qui prévaudra finalement au comité insurrectionnel de Draguignan , comme nous le verrons plus loin.
Mais les paysans d’Artignosc ou d’ailleurs n’en ont pas besoin, ce signal c’est Bonaparte lui-même qui l’a envoyé. C’est bien, comme l’a fait remarquer Philippe Vigier dans « La Seconde République », au niveau local que le soulèvement est décidé : il suffit d’un message né à Salernes ou à Barjols pour les conforter dans leur décision.
La transmission du message, dans cette partie du Var, est confiée au réseau des sociétés secrètes : c’est dans le local de celle de Salernes [31] que se réunissent les dirigeants des sociétés; c’est le président de Salernes qui convoque la réunion; ce sont des affiliés qui vont porter ce message aux présidents ou vice-présidents des communes éloignées, qui eux mêmes le répercutent chez leurs voisins.
Mais le réseau paraît plus improvisé qu’organisé : Salernes ne reçoit pas d’accusé de réception et charge de nouveau dans l’après-midi du 6 décembre des émissaires de Montmeyan de joindre Régusse et Artignosc.
4.2 Le temps des farandoles et de la République Sociale
La nouvelle de la marche vers Draguignan pour la défense de la Constitution et des Droits déclencha la liesse à Artignosc. Entre 7 et 8 heures, à la pointe du jour, les habitants entament des farandoles, au son de la Marseillaise et « autres chants anarchiques »[32], à coté de l’église et pendant l’office.
La farandole est alors la forme la plus courante de manifestation politique et se retrouve, accompagnée de la Marseillaise, dans la plupart des villages varois le jour du soulèvement : nous avons vu celle du jeudi 4 à Salernes , si ambiguë; il y en aura une imposante à Régusse le samedi lorsque arrivent les résistants des villages voisins; d’autres ont lieu aux Salles , à Tavernes ; ce même jour une farandole réunit 60 personnes à Montmeyan , au retour des émissaires[33] que l’on a envoyé à Barjols .[34]
Clair Maurice Grambois, l’assez fortuné instituteur communal, essaie de faire cesser celle d’Artignosc. Antoine Pellegrin lui répond que la République venait d’être proclamée. Jean-Baptiste Maouri dit que « les riches avaient assez commandé » et qu’ils « arrangeraient ceux qui possédaient 6 ou 700 000 francs ». Le maire intervient et ne reçoit que quolibets.
César Jean et Louis Pellegrin, conseillers municipaux, et Joseph Constans Mourron, adjoint, lui demandent les clefs de la Mairie. « Le Président de la République est déchu…, les citoyens sont tenus de lui refuser obéissance. », disait le fameux article 68. « On pouvait en déduire assez naturellement que les autorités administratives qui continuaient à obéir à Bonaparte au-delà du 2 décembre, étant complices de sa forfaiture, devaient être frappées de la même déchéance et remplacées par des citoyens résolus à défendre la Constitution. »[35] La prise de la mairie et le remplacement de la municipalité faisaient d’ailleurs partie du message transmis par la filière salernoise .
Cette déchéance et ce remplacement ont lieu le lendemain matin dans le village voisin de Moissac où le maire[36] est déposé par son adjoint et président de la société secrète[37], en ces termes : « Attendu que le Président de la République a violé la Constitution, je vous déclare, par ces motifs, déchu des fonctions de Maire et de conseiller municipal de Moissac. » Une autre proclamation a été faite la veille à Barjols : « Louis Napoléon Bonaparte est coupable de haute trahison et est déchu de ses fonctions. Le conseil municipal est dissous, une municipalité nouvelle se forme. La République Sociale est proclamée. »
Même à Baudinard , au maire pourtant rouge mais fort discret en ces journées, on prend les clefs de la mairie, dès le matin du samedi 6.
La question se pose au même moment à la société de la Fontaine où sont réunis les résistants de Bauduen [38]. Faut-il changer l’administration municipale et placer à sa tête le docteur Gérard avec le président de la société secrète[39] pour adjoint ? La majorité de l’assemblée refuse.
A Régusse , la même question revient le même jour à la chambrée des Descaladaïres (les dépaveurs). On estime que la municipalité actuelle est suffisamment républicaine…
A Montmeyan , où le maire[40] est un affilié, on lui demande tout de même les clefs de la mairie avant de battre le rappel afin que la population assemblée nomme la commission provisoire (dont il fera partie).
A Artignosc, la consigne ne sera pas appliquée tout de suite : le maire demande d’abord qu’on lui donne décharge des archives. Constans Mourron refuse. On décide de placer une sentinelle[41] devant la mairie. Le maire en fait autant. On attendra le lundi, où, tôt le matin, César Jean revient de Salernes avec l’ordre express de déposer le maire et de marcher sur Aups.
Dans la matinée de ce samedi, après que la trompette[42] a fait deux fois le tour du village à 6h, les farandoles reprennent, drapeau en tête. Quelle était la couleur de ce drapeau ? Aucun des témoins n’en parle. Sans doute était-il rouge, comme à Barjols ou comme celui qu’on arbore[43] dans les rues de Baudinard et qui sera porté lors de la marche sur Aups[44]. Ou bien était-ce un drapeau tricolore roulé sur sa hampe ne laissant apparaître que sa partie rouge, comme l’on fit lors de la farandole de Montmeyan [45]. Mais il pouvait s’agir aussi d’un simple drapeau bleu-blanc-rouge, tel celui brandi lors de la farandole des Salles [46].
Avec « un air menaçant », on va demander au maire de rendre tous les accessoires de la mairie : clefs, sceau, écharpes,… On le conduit à la mairie en le faisant marcher le premier, « comme un criminel », se plaindra-t-il, au son de la Marseillaise. On le dirige ensuite chez l’instituteur pour récupérer des papiers municipaux, « suivi par cette cohue qui grossissait, toujours drapeau en tête et Marseillaise ».
Jean-Paul Quinson fut nommé secrétaire de Constans Mourron, lui même nommé maire et César Jean adjoint. On apposa des scellés sur la porte de la mairie.
La municipalité provisoire est ainsi formée par des affiliés. Mais l’organisation de cette nouvelle municipalité n’est pas la transposition de l’organigramme de la société secrète : si César Jean est vice-président, Joseph Constans Mourron n’est qu’un simple affilié. Si on les a choisis, ce n’est pas pour leurs responsabilités dans le parti républicain clandestin, mais pour leur position d’élus municipaux : la municipalité étant déchue, on opère un glissement de l’adjoint, véritable Républicain, vers le poste de maire. De même, c’est en leur qualité de conseillers municipaux garants de la Constitution que les mêmes Constans et Jean, avec Louis Pellegrin, prennent possession de la mairie. Ce n’est donc pas la société secrète qui prend le pouvoir, elle ne fait pas son coup d’Etat local, mais a, au contraire, sans cesse ce souci du respect de la légalité. Souci qui se traduit aussi par la non-confusion des locaux occupés par la résistance : la société continuera de se réunir dans le local de la chambrée réouverte, siège du parti, et non dans la maison commune, siège de la République; deux locaux que l’on prend autant de soin à mettre sous garde pendant que la masse marche vers Aups.
Cette distinction entre le parti clandestin et la municipalité se retrouve dans plusieurs villages voisins.
A Quinson non plus, ce n’est pas le président de la société[47] qui devient maire, mais son frère[48]. Idem à Moustiers , où le nouveau maire est François Bernard et non le président[49]. A Moissac , c’est certes le président[50] qui prononce la déchéance du maire et devient maire provisoire. Mais il était adjoint élu. Il rendra spontanément les clefs de la mairie le jeudi 11.
Le cas de Montmeyan est un peu particulier. L’émeute du 1er mars 1848 contre le propriétaire Layet, et les condamnations qui en découlèrent, ont écarté les meneurs rouges du conseil municipal, dont le maire. La résistance de Décembre est donc l’opportunité qu’ils attendaient pour être désignés « par le peuple assemblé ». Le vice-président[51] et condamné de 1848, devient ainsi adjoint. Le président[52] et lui aussi condamné, redevient maire. La plupart des chefs de section sont membres de la commission provisoire.
Pour Barjols , on ne connaît pas la composition du nouveau conseil. Mais le président[53] signe les laissez-passer « pour le maire absent ». Absence toute théorique, le maire[54], un démocrate modéré, n’ayant pas quitté la ville.
4.3 L’appel de la route
Les bruits les plus divers parviennent au village : « les Basses-Alpes marchent sur Digne ou Forcalquier », raconte Joseph Constans Rabassier, qui l’aurait appris à Quinson , « Napoléon est déchu[55], le juge de paix de Tavernes a été arrêté, la République rouge a été proclamée. »
Nous n’avons pas pour Artignosc de témoignage concernant ceux qui ont appelé au départ. Il ne peut s’agir que des dirigeants de la société secrète : Antoine Pellegrin, César Jean, Auguste Guion… puisque tous les meneurs républicains du village en faisaient partie.
Nous avons par contre des traces de ces appels dans les communes voisines.
A Baudinard , outre le vice-président[56] qui aurait menacé ceux qui ne partiraient pas de ne pas avoir leur part du partage des forêts de Sabran, il semble que ce soit Hyacinthe Monges qui prenne la parole. Maurice Agulhon, dans « La République au village », voit en lui le chef de la société secrète. Mais son appartenance à cette société n’est pas établie. Hyacinthe Monges est un médecin originaire de Baudinard qu’il a quitté depuis longtemps pour Marseille et où il est revenu depuis quelques mois. A Marseille, « où il a figuré dans plusieurs émeutes », d’après le maire d’Artignosc. Il était en contact avec Albert Laponneraye, le chef de file du communisme néo-babouviste de tradition jacobine, rédacteur en chef de La Voix du Peuple, dont il dit avoir été le médecin. C’est l’argument qu’il emploie lorsqu’on lui demande s’il connaît Louis Rique, le leader montagnard marseillais . « J’ai dû le croiser dans les locaux du journal. » Ce journal « républicain des Bouches du Rhône, du Var et des Alpes » est celui qui dépêcha Louis Langomazino dans les Basses-Alpes organiser la Nouvelle Montagne et ses sociétés secrètes, celles même qui amenèrent Artignosc et Baudinard à s’organiser de la sorte. De plus, le maçon marseillais Joesph Latil, qui a procédé, en compagnie de Jean-Baptiste Constans Surian, aux premières initiations de Baudinardais et d’Artignoscais, travaillait chez lui à Baudinard. Monges pouvait donc fort bien diriger celle de Baudinard. Il s’en défend pourtant : « On se fait trop facilement trahir. », dit-il lorsqu’on lui demande s’il est affilié. « Je n’ai pas eu besoin de pousser les habitants. A l’élection présidentielle, sur 125 votants, il y a eu 123 voix pour Ledru-Rollin ![57] Et à cette époque je n’étais pas venu à Baudinard depuis 2 ans. Au moment de l’insurrection, je n’étais à Baudinard que depuis le mois d’octobre. Je n’ai jamais fréquenté les chambrées, je n’ai donc pu exercer aucune influence. » En fait, Baudinard est déjà, lors de la présidentielle, sous l’influence du club du Jeu de Paume de Draguignan , dirigé par Honoré Pastoret.
Monges est-il vraiment un meneur ? Le président de Baudinard , livre maints détails sur la société : par exemple 38 noms de membres. Mais à aucun moment il n’essaye de charger Monges d’aucune responsabilité, hormis la surveillance du courrier de Riez . Il dit ignorer si Monges appartenait à la société secrète. Pourtant Monges est alors en fuite (il est arrêté à Gréolières ) et il lui aurait été facile de l’accabler, ce qu’il a fait pour le vice-président[58]. Aucun autre inculpé ne cite Monges dans les récits des cérémonies ou parmi les recruteurs. Même le curé[59], loin d’être rouge et qui donne un témoignage sur les événements à Baudinard, ne charge pas Monges.
Certes, la formation intellectuelle de Monges et son séjour à Marseille l’ont rompu à déjouer les interrogatoires policiers. Mais cette absence complète de témoignages sur son affiliation laisse à penser qu’il était plutôt à Baudinard en retraite de la politique, retraite qu’il a quittée lors de ces journées.
A Barjols , celui qui pousse au départ est Charles Édouard (Charles de la Blaque, du nom de sa campagne), le président de la société de La Verdière , société marraine de celle de Barjols et dont la colonne était de passage. Il impressionne la foule : « Il était bien vêtu et il parlait français. »
Cet appel venu de l’extérieur se retrouve à Moissac , où c’est le dracénois Jean David Alter qui exhorte au premier départ. Le président artignoscais Antoine Pellegrin jouera ce rôle un peu plus tard à Régusse et le lundi, pour le second départ, à Bauduen . Le vice-président d’Artignosc, César Jean, poussera les Aupsois dans la nuit du 7 au 8.
4.4 La première marche
Dans la journée du samedi 6 décembre, la colonne des Républicains d’Artignosc se dirige sur Draguignan, sans arme. Elle ira jusqu’à Aups . A pied bien entendu, ce qui représente une marche de plus de 4 heures. Ce mauvais chemin, impraticable par les cabriolets de l’époque, passe alors par Pampelonne, la forêt du Deffens de Régusse en évitant ce village, pour aboutir à proximité de Moissac .
Pourquoi partir sans arme ? Raymond Huard nous donne une réponse : « L’insurrection, tout en faisant échec à un éventuel coup d’Etat, en reconquérant le suffrage universel, serait à peine violente tant elle serait massive, démonstrative, plus que réellement combative, une promenade militaire en quelque sorte. »[60] On part donc vers Draguignan plus pour manifester que pour prendre la préfecture d’assaut.
A Bauduen , on affirme être parti pour « réclamer le vote universel et la délivrance de prisonniers. »[61]
A Baudinard , il s’agit d’aller réclamer les droits de la commune sur les bois du duc de Sabran. « Les soldats ne tireront pas sur nous car nous crierons : Vive la Ligue ! », argumente Hyacinthe Monges. Le lendemain, pour l’adjoint régulier et chef de section[62], l’important n’est pas tant d’être armé que d’être nombreux : « Il s’agit de tous se présenter demain. Nous ne voulons faire de mal à personne. Nous voulons seulement nos droits. Il ne s’agit pas d’être bien armés, n’auriez vous que des mouchoirs à la poche. Les gens d’Artignosc n’étaient pas armés différemment hier. Mais il faut vos personnes. »[63]
Même souci à Montmeyan , où, comme à Baudinard on avait connu l’émeute agraire en 1848 : on part « pour plaider le bon droit du pays dans la forêt de l’ancien seigneur. »[64]
Dans cette région où, au printemps 1792, on avait pillé les châteaux de Régusse et de Moissac , détruit celui de Salernes , fait des démonstrations menaçantes à Baudinard et Artignosc, ce n’est plus la demeure de l’ancien seigneur ou du bourgeois qui lui a succédé que l’on prend pour cible. En Décembre, si l’on a encore des problèmes à régler avec l’oppresseur local, on entend le faire par le Droit. Par la politique nationale et non par la violence localisée. En résistants, plus qu’en insurgés.
Les Artignoscais sont une cinquantaine. Uniquement des hommes. La seule femme ayant participé à la marche dans cette partie du Var, d’après les sources dont nous disposons, est Céline Monges, l’épouse du fameux médecin de Baudinard . Les témoignages sur sa participation (comme sur celle de son mari) restent très vagues. Il paraît quasiment certain qu’elle a participé à la seconde marche, le lundi, soit à pied, soit à cheval. Si nous nous arrêtons un instant sur Céline Monges, c’est qu’elle a acquis quelque célébrité par la prose d’Hippolyte Maquan, journaliste conservateur, otage de la colonne Duteil, qui lui donna le nom de Dame rouge de Baudinard[65].
L’absence des femmes dans ces journées doit être lue comme un des traits du caractère éminemment politique de Décembre. La répression, soucieuse de présenter l’événement comme une jacquerie manipulée par les « démagogues », va tenter d’accréditer l’idée classique des maléfiques interventions féminines, poussant à la débauche, à la violence, à la profanation. Les Républicains ne répliqueront que par la glorification de quelques figures remarquables. Lorsqu’en 1848, les femmes ont participé aux émeutes à Montmeyan et Baudinard , la transition n’est pas encore achevée entre le schéma traditionnel de la « jacquerie » archaïque, où c’est la communauté qui réagit, et la manifestation politique « moderne », qui est le fait d’individus (organisés ou pas). En Décembre, les individus agissant sont des citoyens. Il y a maintenant peu de place pour les autres : pour longtemps, la politique est une affaire d’hommes.
Pour ce qui concerne Artignosc, on ne peut formellement distinguer qui a marché le samedi ou le lundi, mais la plupart a pris part aux deux marches. D’après les dénonciations du maire et les différentes dépositions des résistants, on connaît les noms de 58 d’entre eux. On trouve là la presque totalité de la société secrète : seuls manquent à l’appel Joseph Bormes, un moyen propriétaire, Joseph Constans Passeron, un autre moyen propriétaire, Emmanuel Gérard, fils d’un moyen propriétaire, et le petit propriétaire Louis Raynaud, soit seulement 4 des 57 affiliés. D’autres se joignent à la résistance sans s’affilier durant la marche : outre Sébastien Constans que nous connaissons déjà[66], Jean-Baptiste Bagarry Crouzat, frère et beau-frère d’affilié, cultivateur, Jean-Louis Bourges, petit cultivateur, et les frères André et Augustin Constans, fils d’un moyen propriétaire.
Nous remarquerons que les résistants artignoscais sont majoritairement des paysans. Reprenons le tableau 3 (Activité professionnelle des affiliés artignoscais), et adaptons-le à la résistance en fonction des corrections apportées ci-dessus et en réintégrant les absents du recensement de 1851 pour lesquels nous connaissons une activité :
Tableau 10 : Activités professionnelles des résistants artignoscais
Cette part des paysans est en général sous-évaluée par les historiens[67] qui se basent sur les statistiques de la répression où effectivement les petits bourgeois et les artisans apparaissent en proportion plus importante. Ce qui s’explique aisément par le rôle d’encadrement dévolu à ces catégories plus instruites et qui en a fait la cible privilégiée de la répression.
Quant à l’âge des résistants, il n’est guère différent de ce que nous avons vu précédemment pour la société secrète. Reprenons le tableau 1 et adaptons-le à la résistance en fonction des corrections apportées ci-dessus :
Tableau 11 : Ages des résistants d’Artignosc
Lors de l’enquête qui a suivi les événements, certains disent avoir été forcés à marcher. Certes, cela peut répondre au souci de se disculper. Le maire, d’ailleurs, en établissant la liste des membres de la colonne, indique qui « a été forcé à marcher sur Aups ». Mais ces annotations correspondent peu avec le degré d’engagement de certains : ainsi, son gendre, Jean-Honoré Sappe, qui était chef de section de cette société et de la colonne. Nous avons aussi des exemples d’Artignoscais qui ont refusé de partir. Parmi ceux-ci, aucun membre de la société secrète, donc aucun Républicain convaincu. La cohésion politique des Républicains artignoscais ne laisse entrevoir aucune fissure. Pourquoi des réfractaires ? Parce qu’ils n’ont pas cédé aux menaces ? Ou bien parce que celles-ci n’étaient pas bien méchantes ?
« Les citoyens sont tenus de lui [le Président de la République félon] refuser obéissance » disait la Constitution. N’était-il pas normal pour des résistants qui combattent pour le respect de la légalité de décréter une mobilisation à laquelle les citoyens avaient pour devoir de participer ? Cette mobilisation des hommes était somme toute aussi légitime que les réquisitions d’armes, de vivres et de logements auxquelles on procéda à Régusse et à Aups .
La mobilisation est d’ailleurs formalisée dans quelques communes environnantes. A Montmeyan , le maire[68] proclame, dans la nuit du 7 au 8, la mobilisation des hommes de 18 à 50 ans. Il doit ramener cet ordre de Salernes , où il s’est rendu en voiture dans la journée du dimanche 7. Il faut dire que Montmeyan n’avait fait partir vers Salernes, le matin même, que 24 ou 26 jeunes gens, dont le plus âgé a 30 ans, c’est la « colonne des jeunes »[69], nom qu’on lui donne le lendemain lorsque, après la mobilisation, part la « colonne des vieux », malgré l’intervention du juge de paix du canton, l’artignoscais Jean-Baptiste Isidore Constans.
La mobilisation des 18 à 50 ans se retrouve à Moissac , le matin du lundi 8, et le lendemain à Aups .
La colonne artignoscaise, en ce samedi 6, a donc plutôt la forme d’une manifestation que d’une expédition militaire : pas d’arme, pas de tambour, son encadrement est politique, ce sont les chefs de section de la société qui la dirigent. Nous sommes bien loin du complot que dénonceront les conservateurs après la répression, tel l’évêque de Gap qui pourfend les sociétés secrètes « organisées dans l’ombre pour la guerre civile et le meurtre ».[70]
Cette organisation ne se retrouve pas dans les colonnes des autres villages où tambour et drapeau rouge précèdent des hommes armés, même si tous ne le sont pas ou n’ont qu’un fusil sans cartouches, et où on a choisi les anciens militaires, plutôt que les cadres des sociétés secrètes, pour commander : à Baudinard par exemple, c’est un simple affilié[71] qui « commande l’exercice » en compagnie d’un chef de section et ancien militaire[72]; et si le lundi, lors de la seconde marche, c’est le président[73] qui commande la colonne, sabre au poing, il le fait en sa qualité d’officier de la garde nationale.
La particularité artignoscaise est certainement due au niveau d’organisation de son parti républicain : la société secrète y est plus ancienne qu’ailleurs, regroupe depuis plusieurs semaines, sinon plusieurs mois, la quasi-totalité des Républicains de la commune, et elle s’est dotée de cadres depuis presque un an, alors que dans la plupart des villages varois qui l’entourent (sauf Barjols ) les sociétés ne se sont vraiment structurées qu’au cours de l’automne 1851 : Les Salles choisissent leurs chefs de section fin septembre, Baudinard en novembre, Bauduen le 30 novembre, Régusse devant même en nommer cinq le samedi 6 décembre. La colonne d’Artignosc a donc une organisation qui peut apparaître naturelle : celle du parti.
Mais au contact des autres colonnes, et au retour de César Jean de Salernes , cette organisation va être modifiée pour la seconde marche, le lundi 8. Cette fois-ci la plupart des marcheurs sont armés, de fusils, simples ou doubles, ou de sabres, les chefs de section ne sont plus seuls à commander, on leur adjoint Jules César Laurent (qui retrouve la fonction qu’il a perdue au printemps) et, arrivé à Aups , le commandement du détachement artignoscais est confié à deux chefs de section en leur qualité d’anciens militaires : Pons Dauphin et Jean-Pierre Bourges.
4.5 Le temps des baptêmes
Durant ces journées, où la République est à l’ordre du jour, les initiateurs artignoscais vont faire de nouveaux adeptes.
En cours de route, le samedi 6, on en profite pour baptiser Montagnards 4 personnes qui n’étaient pas encore affiliées. Évidemment, la cérémonie est réduite à sa plus simple expression : le serment de fidélité à la République, de défense de la Constitution et de préservation du secret. Jean-Baptiste Gailleul, dit Maouri, resté de garde à Artignosc avec César Jean, est reçu le soir du lundi 8. Ces affiliations de dernière minute sont destinées à renforcer la cohésion d’un mouvement où les baptisés forment la masse et à s’assurer, par un serment sur la vie, l’engagement total des résistants.
Dans d’autres villages, comme Montmeyan , Aiguines , Moissac et Salernes , des réceptions sont faites avant le départ. A la société du Niveau, trois Baudinardais sont reçus ce même jour. Mais, il reste encore des Républicains à initier…
A la jonction de la route menant de Baudinard à Moissac , les Artignoscais attendent les résistants de Baudinard qui sont partis de chez eux vers 10 h, trompette et drapeau rouge en tête. Durant cette attente, les Artignoscais interceptent un Baudinardais [74] qui se rend seul à Aups « se renseigner sur les événements », et lui demandent d’attendre la colonne de son village. Le rassemblement des deux colonnes opéré, on se dirige vers Moissac et, « à quelques minutes » de ce village, on fait une pause, le temps d’y envoyer un petit détachement en avant-garde. En attendant son retour, les Républicains de Baudinard veulent procéder à quelques réceptions à la société secrète. Le vice-président[75] de la société fait former « à droite de l’aire » un carré au milieu duquel s’agenouillent une quinzaine de Baudinardais qu’il appelle nommément et qui n’étaient pas encore baptisés. Un d’entre eux proteste (celui que les Artignoscais avaient intercepté). Louis Pellegrin d’Artignosc menace de le fusiller. Le carré se rompt et les réceptions se font à part, individuellement, menées par André Guichard, Pellegrin, César Jean et Henri Martin. Un seul aurait refusé[76].
Cette halte à proximité du village de Moissac va également être le théâtre d’une autre dissension au sein des Républicains baudinardais. Ils se trouvent en effet à proximité d’une croix de mission. Isidore Guieu, adjoint et chef de section, proclame : « Il faut qu’à notre retour cette potence saute ! » S’en suit un vif débat entre les présents où un autre chef de section[77] menace Guieu s’il continue à insulter la religion.
Ce type d’incident a déjà eu lieu plusieurs fois dans la région avant ces événements, comme à Artignosc où cela a amené la fermeture de la chambrée rouge. Une autre altercation opposera le surlendemain, lundi 8, un chef de section[78] au curé sur la place de Bauduen . Ce sont de vieilles connaissances qui se sont déjà confrontées lors du romérage de la St Barthélémy, en août. Le lundi 8 décembre, au moment du second départ auquel tente de s’opposer le curé, le même lancera : « Les curés en chaire ne ressemblent qu’à des fous qui ne disent que des mensonges. »
Le mercredi 10, Henri Martin et Jean-Baptiste Maouri, placés de garde sur la route, insulteront le curé d’Artignosc.
4.6 Du flottement dans la direction
A la halte de Moissac arrive un cafetier dracénois nommé Jean David Alter. Il est certainement accompagné d’un Aupsois [79]. Ils doivent être à cheval. Ils étaient venus à Moissac, avec une partie de la colonne de Bauduen , pour pousser au départ : « Il faut rejoindre une colonne de six mille Marseillais qui vont manifester à Draguignan. »
Alter envoie un Montagnard de Baudinard [80], qui jouera les estafettes durant 3 jours, porter des ordres à Montagnac ou, « si Montagnac n’est pas levé », à Riez . Ces ordres portent que Brignoles et Barjols sont pris par les résistants. L’estafette remettra ce billet à un factionnaire, à l’entrée de Riez[81]. Alter s’étonne que les Artignoscais ne soient pas armés : il leur demande de rentrer chez eux chercher des armes.
La plupart rentrent donc à Artignosc sauf le tisserand sexagénaire Victor Dauphin qui continue sur Aups, avant de gagner Montferrat puis Draguignan le 7, et Flayosc , le 8. Il y est arrêté avec 50 autres résistants qui cherchaient à rallier l’armée républicaine, après un bref engagement où un soldat fût blessé avec le 50° de ligne conduit par le préfet Pastoureau en marche sur Draguignan. Victor Dauphin était-il allé à Draguignan prendre des ordres ? De la part d’Alter ? Est-ce lui qui ramène ce petit groupe ? Etait-il allé espionner comme le jugera la commission mixte ? Ou, tout simplement comme il l’a déclaré, était-il parti régler quelques affaires ?
De leur côté, Pellegrin et « quelques autres » d’Artignosc et de Baudinard (mais sans Moissac , qui, sous la direction d’Alter, se dirige sur Aups) se rendent à Régusse , pousser au départ. Des Artignoscais[82], qui sont partis prendre des armes, les rejoindront.
On connaît mal les événements de Régusse , tant par la perte d’une partie des dossiers de la répression (dont l’interrogatoire de H.F. qui, semble-t-il, donnait de nombreux détails sur l’organisation de la société secrète), que par le souci exclusif de la commission mixte d’établir la responsabilité du maire, le notaire Célestin Gariel. On sait toutefois qu’une farandole se déclenche, tambour en tête, à l’arrivée de la délégation. Quarante à cinquante Régussois repartiront avec elle.
Ils partent alors, vers 18h, dans la nuit, tous ensemble, Artignosc, Régusse , Baudinard , Moissac , pour Draguignan, tambour battant, drapeau rouge en tête. A St Pierre près d’Aups , à la croix St Honoré (croisement de la route de Vérignon), ils sont attendus par des Aupsois et la partie de la colonne de Bauduen qui est restée là. Ils seraient 300 d’après le maire d’Aups qui écrit immédiatement au préfet. Ils installent un bivouac autour de feux et peuvent enfin se réchauffer : cette fin d’automne est glaciale.
Arrive alors vers 21h, une estafette, le médecin de Bauduen , Marc Gérard. C’est lui que les Républicains de Bauduen avaient le matin même pressenti pour remplacer le maire. Mais la majorité de la réunion qui s’était tenue à la chambrée des rouges, celle « des bossus », avait refusé de changer d’administration municipale. « Je ne puis dire que Mr Gérard fit partie de la société secrète, mais il s’était montré bon Républicain. » déclarera un leader de Bauduen.
Il revient de Salernes avec l’ordre[83] de ne pas marcher sur Draguignan : « Le moment du départ n’est pas encore arrivé ». Gérard avait quitté Bauduen vers 14h pour prendre des instructions à Salernes et savoir ce qui se passait à Draguignan. Il arrive au déclin du jour et se rend chez le notaire Alexandre Gariel, le frère du maire de Régusse , qui est en train de souper. Celui-ci l’entraîne au Café[84] où 400 personnes sont réunies. Les orateurs ont peine à se faire entendre. On se retrouve alors en cercle plus restreint dans la boutique du coiffeur[85]. Il y a là, parmi le petit groupe, outre Gérard et Gariel, Alexandre Cotte, le maire républicain, père du président Paul, et Ignace Renoux, le conseiller général. Renoux revient de Draguignan où il est allé voir le Comité démocratique qui s’est mis en place à la nouvelle du coup d’Etat. Il ne dispose que de 200 hommes armés et n’a pas trouvé de chef militaire. Ce Comité est assez pessimiste quant à la réussite d’un soulèvement sans l’appui de la garnison de Draguignan, trop travaillée par le parti de l’Ordre. Aussi, Renoux a changé d’avis par rapport à la lettre qu’il avait faite parvenir à Salernes la veille au soir. Il se range maintenant aux idées de Pastoret, d’autant plus que dans la journée, un Salernois[86] est revenu d’Avignon avec les nouvelles de Paris, de Marseille et du Vaucluse. Malgré l’opposition du pharmacien[87], déterminé à agir, Renoux conseille donc à Gérard de dire aux gens de Bauduen de rentrer chez eux jusqu’à nouvel ordre et d’en informer les autres communes en demandant aux responsables aupsois d’y envoyer des estafettes.
Revenons au bivouac d’Aups . Alter s’oppose énergiquement à ce contre-ordre venu de Salernes qu’il ne veut croire. Gérard engage sa tête. On demande aux gens de Bauduen si on peut lui faire confiance. Ils certifient sa bonne foi. Isoard envoie tout de même deux estafettes[88] se renseigner à Salernes. Les présidents de Baudinard et d’Artignosc interdisent aux marcheurs d’entrer dans la ville. Tout le monde rentre chez soi, dont les Artignoscais.
4.7 Rassembler les hommes et les armes
Le dimanche, d’après le maire, Monges, le « médecin rouge écarlate de Baudinard », vient à Artignosc dire qu’il faut retourner à Aups le lendemain. A Baudinard, on dit que c’est Pellegrin qui a envoyé un émissaire[89] à la chambrée du Niveau, ce même dimanche soir, donner l’ordre de départ pour le lundi matin.
Le réseau républicain, dont les sociétés secrètes sont l’épine dorsale, fonctionne à plein en ces journées mouvementées. Outre les contacts Artignosc/Baudinard , deux envoyés de Bauduen se rendent aux Salles et on continue à s’envoyer des billets d’un village à l’autre (Baudinard vers Moissac ). Un Artignoscais se rend à Bauduen, à l’auberge de la veuve Audibert. Il apporte l’ordre de départ, « car la Constitution a été violée ». Le matin même, deux Aupsois étaient déjà venus remplir la même mission. Vers 15h, c’est un maçon de Salernes [90] qui vient relancer. A 18h, l’estafette artignoscaise n’est autre que Pellegrin le maréchal. Dans cette auberge de la veuve Audibert, dont le fils Joseph est chef de section et grand initiateur, il rencontre le président des Salles [91] venu aux nouvelles. Pellegrin veut lui faire signer un papier par lequel il le nommait commandant. Ce qu’il refuse. Ce Pellegrin est-il Antoine, le président, ou bien Louis ? Est-ce le dimanche ou le lundi ? Peu importe. Le plus remarquable est que, dès le signal donné, les Républicains initiés impulsent le mouvement dans leur propre village, mais aussi dans les villages voisins, dépassant ainsi le strict cadre de l’action locale contre le gros propriétaire, contre le maire ou le curé, ou pour les droits de la communauté, en faisant appel à une réaction politique moderne, transformant ces ruraux en acteurs politiques nationaux.
Contrairement aux allégations de la presse conservatrice et de la propagande bonapartiste dans les semaines qui suivront le soulèvement, il n’y eut aucune exaction durant ces 5 journées dans la région d’Artignosc. Hormis quelques menaces qui restèrent en l’air, comme celles échangées à Montmeyan entre la chambrée des rouges et celle des Aînés, on peut seulement signaler la démarche, toujours à Montmeyan, de trois condamnés[92] de l’émeute de 1848 qui se font rembourser chacun l’amende de 300 francs par l’aubergiste[93], représentant du propriétaire Layet , cible de 1848.
On met à profit cette journée de répit du dimanche 7 pour chercher des armes (Joseph Vachier va voir les fermiers de l’Avelanède et des Rangs et se voit opposer un refus; Jean-Baptiste Bagarry dit Chevalier va chez Sébastien Constans lui demander son fusil, il l’obtient) et pour recruter dans les campagnes ceux qui n’étaient pas venus au village.
Nous sommes loin des ventes de la Charbonnerie où il fallait posséder un fusil et 25 cartouches pour être admis dans le secret. Nous sommes loin du complot préparé de longue date par les sociétés secrètes que dénoncera la répression bonapartiste. Le réseau républicain qui a diffusé un cérémonial, un serment, des mots d’ordre, un type d’organigramme, n’avait visiblement transmis aucune consigne d’ordre militaire, ni sur les objectifs ni sur les moyens.
C’est ainsi que, dans la plupart des villages, on part à la recherche de fusils. Les Aupsois dévalisent une armurerie; un groupe de Salernois[94] se rend à Sillans prendre les fusils de la mairie; à Régusse , le sergent de ville et vice-président[95] publie la réquisition des armes, « au nom du Peuple souverain et de la Commune »; à Baudinard , comme à Artignosc, on va chercher des armes dans les bastides, y compris chez le garde particulier du duc de Sabran; à Montmeyan , on distribue des balles et de la poudre à qui a un fusil, en promettant à ceux qui en sont dépourvus qu’on leur en procurerait un à l’arrivée à Salernes . Il n’y a qu’à Bauduen que l’on a fabriqué préventivement des balles dans la boutique du maréchal[96] au cours des derniers jours de novembre, alors que l’on sentait l’heure de la résistance approcher.
Le soir, vers 23h, une estafette[97] envoyée à Lorgues ramène à Aups l’ordre de Duteil de prendre les armes et de rejoindre Salernes . Quelques instants plus tard, Gibelin revient de Salernes avec César Jean, qui s’y était rendu le jour même à 15h avec le char à banc. Ils annoncent que Duteil est arrivé à Salernes et que l’ordre est de se retrouver à Aups. S’engage alors une vive discussion où s’opposent « artistes » (les artisans, où l’on trouve les chefs) et cultivateurs. Les premiers disent avoir fait preuve de modération, alors que ce sont les cultivateurs qui auraient été les plus enthousiastes pour partir, décision qui sera finalement prise. Trouvant les Aupsois trop hésitants ou timorés, César Jean[98] les menace : « Je sais que les gens d’Aups se font tirer la manche pour partir. Je vais faire venir mes hommes avec ceux des communes voisines et, en arrivant, je fais feu sur la ville. » On envoie un nouveau courrier à Bauduen . A Aiguines , l’ordre parvient des Salles le 8. La colonne partira dans la nuit du 9 au 10.
4.8 La dernière marche
Une heure après avoir changé la municipalité dans la matinée du lundi 8, et pour la deuxième fois, les Artignoscais partent à 50 ou 60 pour Aups. Ils sont donc aussi nombreux que le samedi. Ce ne sera pas le cas à Bauduen où la modération du docteur Gérard et, peut-être aussi, l’intervention du curé font qu’ils ne sont plus que 18 à partir contre 44 l’avant-veille. Les interventions des Aupsois , du maçon de Salernes et de Pellegrin d’Artignosc n’ont pas eu de succès. Le maire explique que c’est la nouvelle du rétablissement du suffrage universel qui a convaincu le plus grand nombre de s’abstenir. Mais parmi les 18 figurent tous les cadres de la société.
César Jean est resté à Artignosc. Il assure ainsi, au plus haut niveau du parti républicain, la permanence au village. Il rejoindra Aups le mardi vers midi. Henri Martin et Jean-Baptiste Maouri assurent la surveillance du village et de la chambrée.
Au passage, la colonne recrute dans les campagnes (Esprit Jean) et intercepte le courrier.
Ils arrivent à Aups à 16 heures. Certains Artignoscais s’y trouvaient peut-être déjà. D’autres, comme Jean-Baptiste Sappe dit Lion d’Or, les rejoindront le lendemain. Ce lundi est jour de foire. La ville est pleine de personnes venues faire leurs provisions ou vendre leurs pommes de terre, leurs brebis ou leurs pourceaux.
Les premières colonnes de résistants sont arrivées vers 14h de Baudinard , Moissac , Régusse , Les Arcs et Entrecasteaux . On s’empare de la mairie et on met en place une commission municipale.
On s’achète des cravates rouges. On organise le logement chez l’habitant en distribuant des lettres de réquisition. Un Aupsois [99] a ainsi 16 personnes à loger. Les besoins sont si grands que le soir du mardi les Régussois sont priés de rentrer coucher chez eux. Ils emmènent avec eux la colonne de Montmeyan , qui avait rejoint Aups via Salernes , afin de l’abriter pour la nuit. Le maire Célestin Gariel fait des billets de logement et envoie le garde-champêtre réquisitionner des vivres.
A Artignosc, on organise une garde à la porte de la chambrée : Maouri y est placé les 9 et 10 sur ordre de César Jean. Henri Martin est de garde dans la journée du 10 sur la route avec Maouri, pour attendre le courrier, qu’ils devaient faire parvenir aux résistants si besoin. A Baudinard , entre le 6 et le 10, le courrier de Riez à Aups est arrêté tous les jours à l’aller et au retour.
A Aups , le mardi 9, la mobilisation de tous les hommes valides de 18 à 50 ans est proclamée[100]. Vers 14h les résistants se mettent en marche vers Salernes . Mais ils font demi-tour après 500m en rencontrant la grande colonne qui en vient. Pierre Arambide [101] et 8 à 900 hommes, dont les Barjolais , l’avaient quittée pour se diriger sur Tourtour . Duteil et l’Etat major républicain arrivent à 18h. Alter et Monges, trésorier, font partie de cet État major. Les prisonniers pris en otage sur la route de la grande colonne, à Lorgues, sont logés à l’hôtel Crouzet (Grand Hôtel actuel).
Paul Cotte de Salernes est envoyé avec 500 hommes occuper le pont du Verdon à Aiguines afin de préparer le passage de l’armée républicaine sur l’autre rive.
Il y aura 6000 résistants à Aups le mercredi. D’après le maire d’Aups, ils étaient 2000 le 8 à Salernes . La garde de la ville est surtout confiée à des Aupsois , membres de la société secrète mais pas très rouges. On réquisitionne chez les commerçants et artisans des vivres et du matériel en échange de billets de réquisition. Une salle de l’hospice est transformée en atelier de confection par un tailleur de Draguignan : 25 jeunes filles aupsoises y fabriquent des blouses pour l’uniforme des résistants.
Les chefs de village[102] sont réunis le mercredi matin. On propose de lever des impôts forcés dans les communes voisines. Pellegrin affirme être le seul à s’y être opposé. « Si les communes sont pauvres, dit Monges qui préside la commission, nous trouverons partout des habitants riches pour payer : Sabran à Baudinard pour 10000 francs, Gassier à Bauduen pour 10000 francs, Blacas à Vérignon pour 20000 francs, Roubaud et Layet à Aups … » Ces réquisitions ne pourront pas être prises : la troupe arrivent avant que la réunion ne se termine.
Certains Artignoscais étaient déjà partis le matin : Esprit Jean, Lazare Autran, Jean Jean. Les combats font plus de 50 morts parmi les résistants, un seul parmi la troupe et un prisonnier. Tout est fini à midi. Les Artignoscais disent ne pas s’être battus. Charles Autran est soupçonné, sans preuve, d’avoir fait feu sur la troupe. Ils fuient lorsque arrive l’armée et la plupart refuse de marcher vers les Basses-Alpes avec la colonne républicaine conduite par Duteil. Ils rentrent à Artignosc, par les bois, comme Firmin Sappe, Léon Jouvenel et Louis Pellegrin.
Toutefois, quelques uns (Jean-Antoine Fabre, Charles Autran) suivent Duteil. Duteil gagne Baudinard avec 150 hommes. Il y retrouve une partie[103] du contingent salernois qui n’est jamais arrivée jusqu’au pont d’Aiguines . Alors qu’ils ne sont partis que depuis une heure, les Salernois, arrivés au quartier des Gipières, sur les hauteurs d’Aups , entendent la fusillade qui se déroule en ville. Comme dans la colonne d’Arambide postée à Tourtour , c’est la débandade : ils fuient par la crête des montagnes, abandonnant leurs fusils dans les bois ou les champs. On raconte encore aujourd’hui à Baudinard que les Républicains fuyant Aups auraient caché leurs armes, dans le puits des Quatre Coins, une grotte sur la crête du Clapier.
La plupart des Salernois refusent de suivre Duteil et couchent à Baudinard . Duteil et sa colonne, avec les deux Artignoscais, reprend sa route, qui le conduira au Piémont par Riez , Estoublon et Entrevaux . Mais Jean-Antoine Fabre et Charles Autran le quittent à Montagnac pour rejoindre Artignosc.
César Jean et Constans Mourron ont été pris par la troupe dans les rues d’Aups . Vingt-quatre autres résistants artignoscais ne seront arrêtés que le 23 janvier et le 3 février. Artignosc est si loin… Aucun n’avait pris la fuite.
Instrument de liaison entre les Républicains du rebord sud-ouest des grands plans de Provence, les sociétés secrètes de la Nouvelle Montagne n’avaient fait aucun préparatif de caractère insurrectionnel. Elles étaient toutefois prêtes à appliquer les consignes venues des gros bourgs : prise de la mairie, marche sur Draguignan. Elles ne se substituèrent pas aux pouvoirs locaux en place, se contentant, là où la nécessité s’en faisait sentir, d’en exclure ceux qui étaient favorables au coup d’Etat, les remplaçant par des Républicains affirmés. Lorsqu’elles étaient structurées depuis plusieurs mois, comme celle d’Artignosc, elles furent le cadre naturel de l’organisation de la résistance.
Mais ce cadre naturel n’avait d’envergure que communale. En l’absence d’organisation coordonnatrice ou hiérarchique préexistante à la résistance, elles durent céder le pas à un mouvement plus militaire quoique largement improvisé. Les différences de niveau et d’ancienneté d’organisation entre les sociétés et l’absence de chefs reconnus au delà de la commune nuirent fortement à la cohésion de l’improvisation. Ce qui fut certainement moins pesant pour leurs voisins et parrains des Basses-Alpes où chaque Républicain reconnaissait la direction de Manosque ou de Digne .
A ce handicap, il convient, comme le souligne Philippe Vigier[104], et cette fois-ci sur les deux rives du Verdon, d’ajouter la tiédeur de l’engagement des notables républicains. Marc Gérard, médecin de Bauduen , Célestin Gariel, notaire de Régusse , Antoine Bourjac, maire de Baudinard , Prosper Allemand, médecin de Riez , Ignace Renoux, conseiller général de Salernes , hésitèrent et/ou reculèrent devant l’épreuve de force. De ces notables rouges, il n’y a qu’Allemand dont nous soyons sûrs de l’affiliation.
[1] D’après Ted MARGADANT, presque 100 000 hommes, de 900 communes, ont participé à la résistance. (op. cité)
[2] d’après LETRAIT Jean-Jacques, « L’Insurrection dans le Var en 1851 », in Bulletin de la Société d’Études de Draguignan, nouvelle série t.XII, 1967
[3] La province en décembre 1851, Paris, 1876
[4] Associations et sociétés secrètes sous la Seconde République, Paris, Pedone, 1905 et Le parti républicain au coup d’État et sous le second Empire, Paris, Pedone, 1906 [5] La Seconde République et le Second Empire, tome 6 de l’Histoire de France d’Ernest Lavisse, Paris, 1921
[6] dans de multiples travaux, dont l’essentiel La République au village, Paris, 1970.
[7] La Seconde République dans la Région Alpine, PUF, 1963.
[8] Archaïsme et modernité en Limousin au XIX° siècle, Paris, 1975
[9] Le mouvement républicain en Bas-Languedoc, Paris, 1982
[10] Sur ce débat, voir l’article de Raymond HUARD, « Une structure politique ambiguë : les sociétés secrètes quarante-huitardes dans le Midi de la France », in Histoire et Clandestinité, du Moyen-Age à la Première Guerre mondiale, actes du colloque de Privas, mai 1977, Revue du Vivarais, Albi, 1979, pages 353-369
[11] AGULHON Maurice, 1848 ou l’apprentissage de la République, Paris, 1992, page 193
[12] canton de Tavernes, 425 habitants en 1851 [13] AGULHON Maurice, 1848 ou l’apprentissage de la République, Paris, 1992, page 194
[14] d’après la déposition du curé de Baudinard , Joseph Gariel, il s’agit de Benjamin Patrice et de Joseph Autran qui viennent avec des instructions écrites de Laurent Simon, président de la société secrète.
[15] ouvriers bouchonniers et d’autres démocrates arrêtés le 22 octobre 1851 pour avoir reconstitué leur « association industrielle » et qui ont été condamnés le 29 novembre 1851 (voir AGULHON Maurice, La République au Village, Seuil, 1979)
[16] Henri Martin
[17] déposition du président de la société secrète de Riez , certainement Marcelin Martiny.
[18] Les républicains de Rians attendaient, quant à eux, un signal des Aixois. Ils montèrent à la tour de l’Horloge pour guetter un grand feu qui, du sommet de la montagne Sainte-Victoire, devait donner le signal du départ. Ce signal ne vint pas et les émissaires de la Verdière et d’Esparron ne réussirent pas à les convaincre de se mettre en marche.
[19] Jean-Baptiste Isoard, Marcelin Gibelin, dit le Manchot, et Emmanuel Tassy.
[20] A son sujet lire : CONSTANT Emilien, « De la Seconde à la Troisième République, le parcours d’un Varois : Paul Cotte, rebelle et politique », in Provence 1851, Une insurrection pour la République, Les Mées, 2000, pages 122-161
[21] les Emancipés (dans la maison Castillon).
[22] Louis Rabel et Sixte Besson, dit le Pape
[23] Henri Bagarry
[24] André Guichard, vice-président
[25] que François Reboul porte en estafette à Joseph Guichard, chef de section
[26] au président Paulin Guichard
[27] c’est également le 4 décembre que l’on apprit la nouvelle à Barjols et à Tourtour .
[28] Article 68 : « Toute mesure par laquelle le Président de la République dissout l’Assemblée Nationale, la proroge ou met obstacle à l’exercice de son mandat, est un crime de haute trahison. Par ce seul fait le Président est déchu de ses fonctions ; les citoyens sont tenus de lui refuser obéissance. »
L’article 110 : « L’Assemblée Nationale confie le dépôt de la présente Constitution et des droits qu’elle consacre, à la garde et au patriotisme de tous les Français. »
[29] AGULHON Maurice, 1848 ou l’apprentissage de la République, Paris, 1992
[30] dont Camille Ledeau qui mourra en Algérie.
[31] la maison de Lazare Meissel
[32] rapport du maire
[33] Gervais Jaubert et de Nicolas Firmin, chef de section
[34] Cette forme de protestation a perduré : le 14 juillet 1943, des jeunes gens d’Aiguines dont on tente d’interrompre le bal, entament une farandole narguant le maire très pétainiste. (GUILLON Jean-Marie, « Villages varois entre deux Républiques », in La France démocratique, mélanges offerts à Maurice Agulhon, Publications de la Sorbonne, 1998)
[35] AGULHON Maurice, 1848 ou l’apprentissage de la République, Paris, 1992, page 200
[36] Benoît Sigaud
[37] Henri Bagarry
[38] Il s’y trouve également Auguste Isnard, fondateur de la société des Salles .
[39] Alphonse Pellore
[40] Jean-Baptiste Basset
[41] Hyacinthe Martin
[42] de Pierre Auric
[43] Laurent Simon
[44] par Pierre Manen
[45] Mais le lendemain, lors du départ de la « colonne des jeunes », le drapeau sera bien rouge.
[46] par Joseph Long
[47] Melchior Avon
[48] Jean-Baptiste Avon
[49] Victor Féraud
[50] Henri Bagarry
[51] Gabriel Denans
[52] Pierre Sicard
[53] Louis Trotobas
[54] Achard
[55] La même rumeur a circulé à Albiosc d’ou Rabassier est originaire (ADAHP, 2 Mi 1/24, fiche de Pierre Hyppolite Garcin, marchand de truffes à Albiosc)
[56] André Guichard
[57] exactement 107 voix sur 112.
[58] André Guichard
[59] Joseph Gariel
[60] Le mouvement républicain en Bas-Languedoc, 1848-1881, FNSP, 1982, page 64
[61] déposition de Joseph Gérard cadet.
[62] Isidore Guieu
[63] déposition de Joseph Gariel, curé de Baudinard .
[64] déposition de Pierre Denans, dit du St Esprit.
[65] MAQUAN H., L’insurrection de 1851 dans le Var, 1853. Au sujet de cette légende, et, plus généralement des femmes dans la résistance de 1851, voir l’article de MERLE René, « L’insurrection varoise de 1851 : documents », in Bulletin de l’association 1851-2001, n°2, juillet 1998, pages 5-10
[66] voir plus haut « les recruteurs et initiateurs »
[67] tel CORBIN Alain, op. cité, page 837. La même remarque a été faite à propos de Charles Seignobos par Maurice AGULHON in « La Résistance au coup d’Etat en province. Esquisse d’historiographie », Revue d’Histoire moderne et contemporaine, janvier-mars 1974, note 22 page 23 ; page 443 de La République au village ; ainsi que page 214 de 1848 ou l’apprentissage de la République.
[68] Jean-Baptiste Basset
[69] commandée par Gervais Jaubert, 45 ans.
[70] mandement du 31 décembre 1851, cité par Philippe VIGIER, in La Seconde République, « Que sais-je ? », PUF, 1975, page 117
[71] César Guieu
[72] Louis Guieu
[73] Laurent Simon
[74] Romain Gailleur
[75] André Guichard
[76] Basile Audibert
[77] Joseph Pons
[78] Ambroise Lambert
[79] Fabre, machiniste
[80] Étienne Ameilh
[81] Riez a de son coté envoyé des estafettes aux insurgés du Var pour les prévenir de l’approche des troupes (ADAHP, 2 Mi 1/24, fiche de Théophile Cotte, maréchal à Puimoisson )
[82] dont Jean-Pierre Bourges et Séraphin Sappe
[83] d’Alexandre Gariel, Ignace Renoux et Paul Cotte
[84] celui de Jean-Baptiste Pascal (un chef de section)
[85] Honoré Dauphin, un autre chef de section
[86] le marchand d’huile Jean-Joseph Féraud
[87] Pierre Esclapon
[88] Victor Maurel, fabricant de vermicelles, et François Jassaud
[89] Henri Martin
[90] Marius Latil
[91] Paulin Guichard
[92] Saturnin Brocard, Félix Fabre et Frédéric Saint Martin
[93] Henri Dol, né le 4 avril 1804, lui même gros propriétaire, ancien électeur censitaire départemental, futur maire conservateur du Second Empire.
[94] conduits par Gariel
[95] Grégoire Maunier
[96] François Bagarre
[97] Jean-Louis Arnaud dit Besson
[98] que, visiblement, bien qu’il soit vice-président de la société d’Artignosc et grand initiateur, les Aupsois ne connaissent pas : ils le nomment tous « Constans tailleur d’Artignosc ». Pour eux, tous les Artignoscais s’appellent Constans.
[99] Paul Isnard
[100] Joseph Icard, menuisier de Baudinard , est dispensé de service au vu de ses 58 ans.
[101] Ancien ouvrier révoqué de l’Arsenal de Toulon , il travaillait pour le journal démocrate-socialiste de Toulon, Le Démocrate du Var, pour lequel il parcourait le département à la recherche d’abonnés.
[102] Laurent Simon représente Baudinard .
[103] commandée par Jean-Baptiste Pascal
[104] La seconde République, Que sais-je ? n°295, 1975, page 116, ou encore Alain CORBIN dans Archaïsme et Modernité en Limousin au XIX° siècle, PULIM, 1999, page 798
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