Loi du 31 mai 1850 modifiant la loi électorale de 1849

Loi du 31 mai 1850 modifiant la loi électorale de 1849

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS.

N° 2170. Loi qui modifie la Loi électorale du 15 mars 1849.

Du 31 Mai 1850.

L’Assemblée nationale a adopté d’urgence la loi dont la teneur suit :

ART. 1er. Dans les trente jours qui suivront la promulgation de la présente loi, la liste électorale sera dressée par le maire, assisté de deux délégués désignés pour chaque commune par le juge de paix et domiciliés dans le canton.

Les délégués auront le droit de consigner leurs observations sur le procès-verbal ; ce procès-verbal sera déposé par le maire, avec la liste électorale, au secrétariat de la mairie, pour être communiqué à tout requérant.

2. La liste comprendra, par ordre alphabétique,

1° Tous les Français âgés de vingt et un ans accomplis, jouissant de leurs droits civils et politiques, actuellement domiciliés dans la commune, et qui ont leur domicile dans la commune ou dans le canton depuis trois ans au moins ;

2° Ceux qui, n’ayant pas atteint, lors de la formation de la liste, les conditions d’âge et de domicile, les acquerront avant la clôture définitive ;

3. Le domicile électoral sera constaté,

1° Par l’inscription au rôle de la taxe personnelle, ou par l’inscription personnelle au rôle de la prestation en nature pour les chemins vicinaux ;

2° Par la déclarations des pères ou mères, beaux-pères ou belles-mères ou autres ascendants domiciliés depuis trois ans, en ce qui concerne les fils, gendres, petits-fils et autres descendants majeurs vivant dans la maison paternelle, et qui, par application de l’article 12 de la loi du 21 avril 1832, n’ont pas été portés au rôle de la contribution personnelle ;

3° Par la déclaration des maîtres ou patrons, en ce qui concerne les majeurs qui servent ou travaillent habituellement chez eux lorsque ceux-ci demeurent dans la même maison que leurs maîtres ou patrons, ou dans les bâtiments d’exploitation.

4. Les déclarations des pères, mères, beaux-pères, belles-mères ou autres ascendants, maîtres ou patrons, seront faites par écrit sur des formules délivrées gratis. Ces déclarations seront remises chaque année au maire, du 1er au 31 décembre. Les pères, mères, beaux-pères, belles-mères ou autres ascendants, maîtres ou patrons, qui ne pourront pas faire leurs déclarations par écrit, devront se présenter, assistés de deux témoins domiciliés dans la commune, devant le maire, pour faire leurs déclarations.

Toute fausse déclaration sera punie correctionnellement d’une amende de cent francs à deux mille francs, d’un emprisonnement de six mois au moins et de deux ans au plus, et de l’interdiction du droit de voter ou d’être élu pendant cinq ans au moins et dix ans au plus.

Les tribunaux pourront, s’il existe des circonstances atténuantes, faire application de l’article 463 du Code pénal. En cas d’empêchement des pères, mères ou autres ascendants, et en cas de refus ou d’empêchement du maître ou patron de faire ou délivrer la déclaration qui doit être remise chaque année à la mairie, le fait du domicile chez les pères, mères ou autres ascendants, ou chez le maître ou patron, sera constaté par le juge de paix.

5. Les fonctionnaires publics seront inscrits sur la liste électorale de la commune dans laquelle ils exerceront leurs fonctions, quelle que soit la durée de leur domicile dans cette commune.

La même disposition s’applique aux ministres en exercice des cultes reconnus par l’État.

Les membres de l’Assemblée nationale pourront requérir leur inscription sur la liste électorale du lieu où siège l’Assemblée.

Ceux qui n’auront pas requis cette inscription ne pourront voter qu’au lieu de leur domicile.

6. Les militaires présents sous les drapeaux dans les armées de terre ou de mer seront inscrits sur la liste électorale de la commune où ils auront satisfait à l’appel.

7. Quiconque quittera la commune sur la liste électorale de laquelle il est inscrit continuera à être porté sur cette liste pendant trois ans, à charge de justifier, dans les formes et sous les conditions prescrites par les articles 3, 4 et 5 de la présente loi, de son domicile dans la commune où il aura fixé sa nouvelle résidence.

8. Ne seront pas inscrits sur la liste électorale, et ne pourront être élus,

1° Les individus désignés aux paragraphes l, 2, 3, 5, 6 et 7 de l’article 3 de la loi du 15 mars 1849 ;

2° Les faillis non réhabilités dont la faillite a été déclarée soit par les tribunaux français, soit par jugements rendus à l’étranger, mais exécutoires en France ;

3° Les individus désignés au paragraphe 4 de l’article 3 de la loi du 15 mars 1849 quelle que soit la durée de l’emprisonnement auquel ils ont été condamnés ;

4° Les individus condamnés à l’emprisonnement en vertu de l’article 330 du Code pénal ;

5° Les individus qui, par application de l’article 8 de la loi du 17 mai 1819 et de l’article 3 du décret du 11 août 1848, auront été condamnés pour outrage à la morale publique et religieuse ou aux bonnes mœurs, et pour attaque contre le principe de la propriété et les droits de la famille.

6* Les individus condamnés à plus de trois mois d’emprisonnement, en vertu des articles 98, 100, 101, 102, 103, 105, 106, 107, 108, 109, 112 et 113 de la loi du 15 mars 1849 ;

7° Les notaires, greffiers et officiers ministériels destitués en vertu de jugements ou de décisions judiciaires ;

8° Les condamnés pour vagabondage ou mendicité ;

9° Ceux qui auront été condamnés à trois mois de prison au moins, par application des articles 439, 443, 444, 445, 446, 447 et 452 du Code pénal ;

10° Ceux qui auront été déclarés coupables des délits prévus par les articles 410 et 411 du Code pénal et par la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries ;

11° Les militaires condamnés au boulet ou aux travaux publics ;

12° Les individus condamnés à l’emprisonnement par application des articles 38, 41, 43 et 45 de la loi du 21 mars 1832 sur le recrutement de l’armée.

9. Les condamnés à plus d’un mois d’emprisonnement pour rébellion outrages et violences envers les dépositaires de l’autorité ou de la force publique, pour outrages publics envers un juré à raison de ses fonctions, ou envers un témoin à raison de ses dépositions, pour délits prévus par la loi sur les attroupements et la loi sur les clubs, et pour infractions à la loi sur le colportage, ainsi que les militaires envoyés par punition dans les compagnies de discipline, ne pourront pas être inscrits sur la liste électorale, pendant cinq ans, à dater de l’expiration de leur peine.

10. Les fusiliers des compagnies de discipline rentreront en jouissance du droit électoral à l’expiration de leur punition.

11. Seront rayés de la liste électorale, à la requête du ministère public pour un laps de temps qui ne pourra être moindre de cinq ans, ni excéder dix ans, et dont la durée sera fixée par le tribunal, les individus qui auront encouru une condamnation pour les délits prévus par les articles 338 et 339 du Code pénal.

12. Les militaires et marins présents sous les drapeaux continueront d’être répartis dans chaque localité en sections électorales par département.

Leurs bulletins seront recueillis et envoyés au chef-lieu du département dans un paquet cacheté, et confondus, dans les diverses sections électorales du chef-lieu, avec les bulletins des autres électeurs.

13. Nul n’est élu ni proclamé représentant au premier tour de scrutin, s’il n’a réuni un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits sur la totalité des listes électorales du département.

14. En cas de vacances par option, démission, décès ou autrement, le collège électoral qui doit pourvoir à la vacance est réuni dans le délai de six mois, à partir de la notification qui doit être faite par le président de l’Assemblée nationale au ministre de l’intérieur.

15. Dans les villes où le contingent personnel et mobilier est payé en totalité ou en partie par la caisse municipale, l’état des imposables à la taxe personnelle, dressé par les commissaires répartiteur, assistés du contrôleur des contributions directes, et qui sert à déterminer le contingent de la commune, sera soumis chaque année au conseil municipal.

L’inscription sur l’état des imposables équivaudra à l’inscription au rôle de la taxe personnelle.

DISPOSITIONS TRANSITOIRES.

16. Pour la confection des listes électorales dressées en exécution de la présente loi pour l’année 1850, toutes les règles prescrites par la loi du 15 mars 1849, en ce qui concerne les délais et les réclamations, seront observées, et les listes seront closes trois mois après la promulgation de la loi.

Les déclarations prévues par l’article 3 seront faites dans les trente jours de la promulgation.

Tout individu qui n’aura pas trois ans de domicile dans la commune où il résidera lors de la confection des listes sera inscrit sur la liste électorale de la commune qu’il habitait antérieurement, s’il y justifie de trois années de domicile, conformément à l’article 3, sans préjudice de ce qui est dit au deuxième paragraphe de l’article 3 de la présente loi.

La révision annuelle des listes pour les autres années sera faite aux époques et d’après les règles déterminées au titre II de la loi du 15 mars 1849.

17. Continueront à être exécutées pour les élections de l’Algérie et des colonies, les dispositions de la loi du 15 mars 1849, jusqu’à la promulgation des lois organiques prévues par l’article 109 de la Constitution.

Délibéré en séance publique, à Paris, le 31 Mai 1850.

Le Président et les Secrétaires,

Signé Dupin, Arnaud (de l’Ariège), Lacaze, Chapot, Peupin, Hezckeiren, Bérard.

La présente loi sera promulguée et scellée du sceau de l’État.

Le Président de la République,

Signé Louis-Napoléon BONAPARTE.

Le Garde des sceaux, Ministre de la justice,

Signé E. Rouher.