LA RÉSISTANCE RÉPUBLICAINE EN AVEYRON
LA RÉSISTANCE RÉPUBLICAINE AU COUP D’ÉTAT DU 2 DÉCEMBRE 1851 EN AVEYRON Mémoire de maîtrise présenté par GRÉGORY POUGET sous la direction de JEAN-CLAUDE SANGOÏ et JEAN RIVES septembre 2002 Introduction
Le milieu du XIXe siècle, marqué par la grave crise économique qui débute en 1846 et par la flambée révolutionnaire de 1848, est en France comme dans toute l’Europe, une période troublée.
En France, la révolution de 1848 met fin à la Monarchie de Juillet et au ministère honni de Guizot et permet l’établissement de la Seconde République accueillie dans le pays par un très grand enthousiasme. La principale avancée du régime républicain est sans contestation celle de l’établissement du suffrage universel masculin. Mais l’élection présidentielle de Louis Napoléon Bonaparte, le 10 décembre 1848, et l’arrivée d’une majorité royaliste à l’Assemblée législative en 1849 font de ce régime une République sans républicains.
Le mandat du Prince Président se situe dans une période de crise générale à la fois économique, sociale, démographique et politique. L’opposition républicaine se prépare pour « l’échéance de 1852 » date à laquelle arrivent à expiration les pouvoirs de l’Assemblée mais aussi ceux du Président. Or Louis Napoléon Bonaparte, qui se sent investi d’une mission, n’a nullement l’intention de quitter le pouvoir. A l’approche de cette date fatidique une « psychose de peur [1] » se propage dans la population révélant une « angoisse devant un avenir singulièrement incertain [2] ».
Au printemps 1851, une campagne révisionniste favorable à la modification de la Constitution se développe avec le soutien du parti de l’ordre,. La majorité des trois-quart nécessaire n’est pas atteinte en juillet 1851. Dès l’été 1851 le président de la République pense sérieusement à un coup de force contre une Assemblée qui lui interdit sa réélection.
Le 17 novembre 1851, une nouvelle proposition de loi dite « proposition des questeurs » est présentée à l’Assemblée. Elle prévoit que le président de l’Assemblée puisse en appeler à la force armée pour assurer la sécurité et la défense de la représentation nationale. Cette loi qui peut être une parade contre un coup d’Etat de Louis Napoléon Bonaparte est rejetée d’une faible majorité. L’Assemblée n’a pas su saisir les moyens d’assurer sa défense. Certains républicains qui rejettent cette proposition vont en garder un amer souvenir.
Le neveu de Napoléon 1er sait pouvoir compter sur l’appui des fonctionnaires, de la totalité des préfets, et sur le concours de l’armée. Le champ est désormais libre. La France s’achemine tout droit vers un nouveau « 18 Brumaire ». L’opération « Rubicon » peut débuter.
« Epris de la symbolique bonapartiste, [Louis Napoléon Bonaparte] choisit le 2 décembre 1851, jour anniversaire du couronnement de l’Empereur par le pape (1804) et d’Austerlitz (1805) [3]. »
Ce coup d’Etat attendu prend cependant tout le monde au dépourvu. Habilement présenté, car il semble dirigé contre la majorité royaliste, il permet à Louis Napoléon Bonaparte de régler à son seul profit le différent qui l’oppose à l’Assemblée. En rétablissant le suffrage universel, il se présente aux yeux des masses populaires comme le défenseur de la démocratie. Dans le même temps, en supprimant le « spectre rouge de 1852 » il apparaît aux yeux des conservateurs comme le rempart de l’ordre. Pour la Seconde République devenue de plus en plus réactionnaire et de plus en plus autoritaire, le coup d’Etat est le « prolongement logique des mois précédents [4] ».
Paris, malgré sa longue tradition révolutionnaire, et les grandes villes, bien que défavorables au coup d’Etat, ne bougent pas ou peu. Le peuple des boutiques et les travailleurs restent indifférents. Le Président leur est bien moins impopulaire que l’Assemblée royaliste.
La résistance se développe en province. « Elle est le grand événement de ce mois de décembre, et peut-être même de la IIe République [5]. » Elle s’effectue dans les petites villes et les campagnes des départements ruraux du Centre, du Sud-Ouest et du Sud-Est, selon la carte de la « province rouge [6] » apparue aux élections de mai 1849.
De 1849 à 1851 les républicains aveyronnais s’organisent. Leur propagande progresse et en butte à l’hostilité conjointe des conservateurs et des autorités ils se préparent à l’échéance de 1852. Pressentant l’épreuve de force, ils s’organisent pour la défense de la Constitution mais le coup d’Etat les surprend dans leurs préparatifs. Ils essayent alors tant bien que mal de résister.
Cette étude a pour objet la résistance républicaine au coup d’état de Louis Napoléon Bonaparte dans un de ces départements du Sud-Ouest à savoir l’Aveyron.
Les sources utilisées pour mener à bien ce travail sont relativement riches. Les journaux contemporains des événements, les rapports détaillés des maires sur la situation de la résistance républicaine dans leurs communes respectives ainsi que les rapports des commissaires de police et des juges de paix permettent d’avoir une vue d’ensemble des faits dans le département.
Si elles sont abondantes, ces sources pâtissent par contre d’un manque certain de qualité. En effet, les témoignages sont le fait de fonctionnaires de l’Etat ou rédigés par ceux-ci. Leur objectivité peut être sujette à contestation. Les autorités ont pu minorer certains faits ou au contraire les exagérer pour mieux servir leur propagande. Les contradictions sont nombreuses et il est parfois difficile de s’y retrouver. Les sources émanent presque entièrement d’une même idéologie et d’un même camp, celui de l’autorité. Quelques écrits de républicains ont également été retrouvés. Dans les deux cas, ces documents sont à prendre avec précaution.
Le coup d’Etat du 2 décembre 1851 a déjà fait couler beaucoup d’encre. On connaît les grands écrits du XIXe siècle : les grands textes des défenseurs de la République, de Ténot à Schoelcher en passant par ceux de Victor Hugo qui fustige « Napoléon le Petit ». On connaît aussi l’histoire officielle érigée et défendue par les chantres du régime napoléonien.
L’histoire de cette période et de cet événement a été profondément renouvelée par les travaux de Maurice Agulhon, de Pierre Lévèque et Raymond Huard puis dans leurs sillages d’auteurs tels que Philippe Vigier, Alain Corbin, Sylvie Aprile … qui ont apporté de nouvelles problématiques et de nouvelles visions . Dans son n° 22 de 2001, La Revue d’Histoire du XIXe siècle présente une riche bibliographie concernant le coup d’Etat du 2 décembre 1851. Celle-ci fait un état des recherches effectuées, des grands ouvrages anciens et récents et propose dans une de ses sous-parties une « bibliographie départementale »[7]. En ce qui concerne la bibliographie locale, deux études de André Ancourt sont référencées. Elles concernent toutes deux un seul des cinq arrondissements de ce département, celui de Villefranche.
Il parait opportun d’apporter cette contribution à ce type d’étude, en s’intéressant au mouvement de résistance tel qu’il s’est développé dans le département de l’Aveyron. Pourquoi ce choix ? Cette échelle géographique permet d’appréhender le mouvement dans sa globalité et non seulement les répercussions qu’il a eues au sein de la localité ou de l’arrondissement où l’action a été la plus virulente comme cela est le cas pour les deux études suscitées. Le choix de cette échelle permet d’observer les différences de comportement et d’attitude vis à vis de cet événement mais aussi d’ appréhender l’influence des républicains dans une « véritable petite région [8] ».
Du point de vue administratif, l’Aveyron est divisé en cinq arrondissements : Rodez, Espalion, Millau, Saint- Affrique et Villefranche.
Le territoire est composé de 44 cantons comprenant 286 communes. En décembre 1851, le département compte 394 183 habitants[9].
La population urbaine se concentre à Rodez, chef-lieu du département, avec 10 280 habitants, dans les quatre villes sous-préfectures avec respectivement : Millau 10 041 habitants, Villefranche 9 531 habitants, Saint Affrique 6 618 habitants et Espalion 4 318 habitants ; et à Decazeville et Saint-Geniez (avec respectivement 5 838 et 3 713 habitants).
La population rurale représente près de 90%[10]. La bourgeoisie tient une place importante dans les villes (jusqu’à 20%). La plupart de ces membres exercent des professions libérales (avocat, notaire…).
Les habitants de l’Aveyron comprennent généralement le français, mais ne le parlent pas correctement[11]. La langue d’oc est l’idiome usuel.
La quasi totalité des habitants est catholique[12].
L’Aveyron est à cette époque un « véritable département industriel[13] », la grande industrie et l’artisanat y sont tous deux représentés. « L’Aveyron qui a, à la fois, la houille, le fer et les torrents, tient une place honorable dans l’industrie métallurgique[14] ». Le département compte deux bassins houillers d’importance nationale : Aubin et surtout Decazeville[15].
L’artisanat est également bien représenté. Le travail du cuir occupe près d’une centaine d’établissements dans le département. Millau est le grand centre de cette activité. Le secteur textile est également très important[16].
L’agriculture est l’activité prépondérante puisqu’elle représente 85 % des actifs. Elle repose sur deux grandes bases : la production de céréales et l’élevage (bovin, ovin, porcin, ou plus rarement caprin).
Le département ne se situe, ni sur de grandes voies de communication nationales, ni dans une zone de transit et d’échanges entre différentes régions. Ce pays où l’idéal du consommateur demeure l’autoconsommation vit en autarcie, se nourrissant des denrées et se servant des objets fabriqués dans le département.
En Aveyron, les notion de propriété et d’autoconsommation sont prépondérantes. Dans la plupart des cas, l’ouvrier travaille à domicile et ne se distingue de l’artisan qu’en raison de sa subordination au fabriquant qui lui apporte la matière première et vient rechercher le produit fini. La double activité est une pratique courante. De sorte que, ouvriers et artisans sont directement associés à une petite paysannerie très nombreuse qui fournit une main d’œuvre abondante aux grands domaines. Les uns et les autres ont de nombreux enfants qui se louent dans les grandes fermes comme domestiques et servantes ou, en ville, chez les notables (nobles ou bourgeois) comme gens de maison.
La société aveyronnaise est donc une société hiérarchisée où les entrepreneurs, les négociants, et les moyens exploitants font la transition entre les notables, nobles ou bourgeois et les petites gens.
L’Aveyron est frappé par la crise du milieu du siècle (1846-1851)[17].
« A mesure que l’hiver avançait, les faibles provisions de grain faites à la mauvaise récolte de 1846 s’épuisaient avec une désastreuse rapidité ; en dépit de tout ce que pouvaient tenter le gouvernement, les communes, les associations charitables, de même que les particuliers. La misère et la disette se faisaient de plus en plus sentir. L’on était témoin avec effroi de ce spectacle navrant : la moitié de la population implorant tristement l’aumône de l’autre moitié de la France. […] Dans le midi, et notamment dans l’Aveyron, grâce à des approvisionnements considérables venus de Russie et d’Egypte, et débarqués à Marseille, on paya d’abord un peu moins cher ; mais ces ressources finirent par s’épuiser, et notre région eut ensuite à souffrir autant que les autres[18] ».
Les campagnes françaises connaissent une surproduction latente et le fléau de l’endettement lorsque commence cette crise de subsistance, dont l’origine vient des mauvaises récoltes de céréales et de pommes de terre ( été 1846 ). L’épuisement des stocks fait flamber les prix en 1847 (ils doublent par rapport à 1845).
La part du revenu consacrée aux produits agricoles augmente brutalement et réduit très fortement celle des achats de biens durables. Les ventes de cotonnades s’effondrent et la crise se diffuse dans la manufacture. Le patronat s’adapte rapidement à la nouvelle conjoncture en se débarrassant d’une bonne partie de sa main-d’œuvre et en arrêtant ses commandes à la fabrique dispersée. Il prive les paysans d’un revenu complémentaire qui permettait de joindre les deux bouts.
La petite paysannerie et le petit prolétariat rural – la masse des journaliers – sont les premiers affectés. Ils ne peuvent plus investir l’argent qu’ils possèdent et ils s’en servent pour payer leurs impôts et rembourser leurs usuriers. Cette misère paysanne touche ensuite les petits tisserands et artisans ruraux. Le phénomène d’abord extrêmement localisé et sectorisé se répand et affecte petit à petit les échelons de la base de la pyramide sociale. Christophe Charle écrit que ce processus de misère, en tant que « source de troubles, alimente aussi une lutte de classe rurale [19]». Cette « lutte de classe rurale » repose sur un constat fort simple : la crise de 1847 fait « des gagnants » mais aussi « des perdants [20]» (qui sont jaloux de ceux qui réussissent mieux qu’eux). Tout cela attise les convoitises et les rancœurs de voisinage.
Le nombre d’indigents augmente à la campagne et dans les villes . La mendicité et la délinquance progressent. Les troubles de subsistance et les actions visant à empêcher le départ des céréales vers d’autres régions se développent. Ceux qui souffrent de la crise ne peuvent accepter de voir partir des grains qu’ils considèrent comme devant leur être distribués et préfèrent procéder à des pillages ou à des destructions plutôt que de les voir partir vers d’autres destinations. On retrouve des traces de ces phénomènes dans les rapports de la gendarmerie et de la police et dans les registres d’écrous[21], dans les séries judiciaires, ainsi que dans la presse aveyronnaise[22] qui s’en fait l’écho.
« La classe indigente, à force de souffrir, entrait dans un état de surexcitation croissante qui la portait à de déplorables excès. En maints endroits, la foule se rua sur des magasins à blé, sur des moulins qu’elle pilla, qu’elle incendia sous prétexte d’accaparement. […] En un grand nombre de localités, d’importants convois de blé que les négociants dirigeaient sur les points où la matière panifiable manquait le plus, furent interceptés par des foules en délire qui semblaient prendre surtout à tâche de détériorer le blé pour le rendre inutilisable. Ces faits se produisaient souvent malgré l’intervention des troupes et de la gendarmerie[23] ».
S’il n’y a point d’affaire aussi triste qu’à Buzançais (Indre) où une émeute s’en prend aux notables, un propriétaire est tué et des maisons riches saccagées et pillées, des troubles affectent l’Aveyron[24]. L’affaire de Buzançais exaspère les antagonistes sociaux et la peur sociale se répand dans la contrée avant de gagner le reste de la France, par l’intermédiaire des compte – rendus que la presse donne de cette affaire et du procès qui s’en suit.
La seconde moitié du XIX e siècle est, du point de vue politique, l’ère des paysans. En 1848, l’instauration du suffrage universel masculin fait que les campagnes détiennent, brusquement, la majorité dans le corps électoral ; et cela jusqu’au premier conflit mondial. Huit jours après la proclamation de la République, avec le décret du 2 mars qui établit que le « suffrage sera universel et direct sans la moindre condition de cens », une nouvelle ère s’annonce. Dans une France rurale, encore fermement encadrée par les propriétaires terriens et l’Eglise, le « suffrage universel » masculin[25]. est proclamé. L’événement, qui est le résultat de l’effondrement aussi rapide qu’inattendu du « système Guizot », est loin toutefois de jeter les bases d’une nouvelle stabilité. « L’avènement du « suffrage universel » s’inscrit dans une période qui enchaîne trois crises : la crise conjoncturelle qui commence en 1846 et qui ouvre la voie à la Révolution de Février, la crise née de la Révolution, du mouvement social, crise qui précipite l’échec de la république citadine, la crise enfin qui se développe de 1849 à 1851, liée à une tentative de république paysanne …[26] ».
Les ruraux découvrent le plus souvent avec enthousiasme le suffrage universel et se pressent en masse pour aller voter. Pourtant, nulle part, on ne voit de candidature paysanne. Si les ruraux se montrent attentifs aux affaires publiques, ils ne cherchent pas à s’en mêler directement en impliquant leur nom. Si les partis, voulant toucher toutes les tranches de l’opinion, présentent des « agriculteurs » sur leurs listes, ce sont la plupart du temps des gros propriétaires que l’on retrouve sous l’étiquette de « cultivateur ». « Les cultivateurs arbitrent, mais n’entrent pas dans la compétition[27] ». Lorsqu’ils sont appelés à se prononcer pour la première fois, les ruraux se sont en effet tournés – quasi instinctivement – vers les personnalités locales ; les « notables » ou les « messieurs » des petits bourgs ; médecins, notaires et avocats, ou gros propriétaires, et leur donnent leurs suffrages.
Ces « notables » envoyés sur les bancs de l’Assemblée représentent des horizons politiques différents. Au sein des assemblées ils sauront faire entendre leurs différences, mais, aux yeux des paysans, « ils représentent un même groupe social, garant de l’ordre et de la conservation des propriétés[28] ».
La Révolution de Février se produit en pleine période de crise agricole. Face à la crise, la campagne se replie derrière ses « notables » en une sorte d’union sacrée. Tocqueville, frappé de ce spectacle lorsqu’il se présente comme candidat dans la Manche en 1848, le relate ainsi :« Les anciennes haines d’opinion, les anciennes rivalités de caste et de fortune n’étaient plus visibles. Plus de jalousie ou d’orgueil entre le paysan et le riche, entre le gentilhomme et le bourgeois ; mais une confiance mutuelle, des égards et une bienveillance réciproques. Les plus riches étaient les aînés, les moins aisés les cadets [29] ». Cette image des aînés et des cadets rend bien compte du patronage qui existe à cette époque, et qui apparaît très clairement lors des élections de 1848 et 1849 comme en témoigne la liste de ceux qui se présentent et bien plus encore de ceux qui sont alors élus représentants du département de l’Aveyron.
La Révolution qui renverse Louis-Philippe du 22 au 24 février 1848, à Paris, est connue à Rodez les 26 et 27 février. La nouvelle de la proclamation de la Seconde République est accueillie dans l’allégresse. Le 11 mars, le citoyen Raginel[30], commissaire du Gouvernement provisoire arrive à Rodez. « Il parcourut les rues de Rodez, faisant des discours républicains sur chacune des places de la ville. Raginel annonça les élections, mais celles-ci furent retardées jusqu’au 23 avril 1848. Entre temps un autre commissaire, Galtier-Boissière, originaire de Saint-Affrique, avait été nommé[31] ».
Les deux préfets sont candidats.
Dès le 24 mars 1848, le commissaire du gouvernement, Raginel[32], donne les noms que le comité électoral, présidé par le général Tarayre[33], et composé surtout de républicains de la
Veille, vient de choisir, comme étant les hommes les plus dignes par leurs antécédents républicains, de représenter le peuple à l’assemblée constituante. Sur cette liste figurent entre autres , Charles Blanc, graveur (frère de Louis Blanc membre du Gouvernement Provisoire) ; l’avocat Louis Bouloumié ; Cantagrel, gérant de « La Démocratie Pacifique » à Saint Geniez ; Henri Carcenac, maire de Rodez ; Cluzel, médecin à Villefranche ; Denayrouse, sous-commissaire du gouvernement à Espalion ; Médal fils aîné, pharmacien et propriétaire à Sonnac ; Alfred Raginel, commissaire du gouvernement à Rodez ; et Vincent Rozier, sous-commissaire du gouvernement à Millau. Il n’y a qu’un seul « petit », l’ouvrier menuisier Cure de Millau, dans une liste constituée en grande majorité de « notables ».
Ces élections sont l’occasion d’une intense propagande électorale. Les « Républicains de la veille » soutenus par un nouveau journal, L’Aveyron Républicain, s’efforcent d’occuper le terrain. Face à eux les « républicains du lendemain » – à la conversion plus ou moins sincère – ont l’appui du Journal de l’Aveyron, doyen de la presse aveyronnaise. Enfin, l’Echo de l’Aveyron soutient les légitimistes.
En Aveyron dix députés doivent être élus. Les élections s’étendent sur plusieurs jours.
Le vote se fait au canton[34]. Les électeurs de chaque commune – tous les citoyens qui ont 21 ans et 6 mois de résidence – sont appelés à se rendre au chef lieu de canton pour voter. Dans la hâte, des listes électorales sont dressées. 104 449 électeurs sont inscrits sur les listes. La participation au vote est considérable : 89 329 suffrages sont exprimés soit une participation de prés de 85,5 % ! A l’image de Tocqueville, de nombreux notables conduisent la foule des électeurs. Mgr Croizier, évêque de Rodez, appelle ses fidèles à prendre part au vote. Les curés conduisent leurs ouailles aux urnes.
Les résultats sont connus le 29 avril. En tête vient un avocat ruthénois de grand prestige, Grandet, qui rassemble 69 490 voix. Huit députés conservateurs ou modérés sont élus. Parmi eux, trois députés font partie de la liste légitimiste (MM Dalbis du Salze, Dubruel et Vernhette) soutenue par l’Echo de l’Aveyron, et deux, (MM. Rodat et Henri Affre – frère de l’archevêque de Paris) – sont soutenus par Journal de l’Aveyron, le principal journal conservateur, et par les « républicains du lendemain ». Grandet et Abbal, vicaire général à l’évêché, sont soutenus par ces deux journaux. Les républicains n’ont que deux représentants. Médal, pharmacien à Asprières et propriétaire à Sonnac, soutenu par l’Aveyron Républicain, et Pradié, notaire à Marcillac.
A Rodez, les trois journées du scrutin sont calmes, mais lors de la publication des résultats les républicains sont furieux. Leur chef de file, Carcenac[35], est battu. Le soir des résultats, ils descendent dans les rues et envahissent l’évêché qui est pillé. Cette attaque vise l’Eglise aveyronnaise, connue pour ses positions conservatrices et qui a réussi à faire élire trois de ses membres. Il y a quelques troubles à Villefranche et à Villeneuve : l’urne est brûlée, mais le calme se rétablit aussitôt après les élections. De leur côté les deux préfets nommés par le Gouvernement provisoire sont largement battus. Galtier-Boissière, enfant du pays et protestant soutenu par ses coreligionnaires (surtout dans le Sud du département), recueille
12 100 voix. Raginel, révolutionnaire et étranger au pays n’obtient que 6 404 voix, soit dix fois moins que le premier élu.
Deux mois plus tard, les journées de juin 1848 ensanglantent Paris. L’archevêque Denis Affre, d’une famille de notables du Sud de l’Aveyron, est frappé à mort sur les barricades. L’émotion est considérable en Aveyron. Désormais, les « rouges » font peur. Les conservateurs les jugent responsables de sa mort Il est bientôt considéré comme un « martyr ». La mort de l’archevêque de Paris, l’inquiétude causée chez les modérés par la révolte parisienne et le mécontentement des contribuables (l’impopulaire impôt des 45 centimes) déterminent un revirement de l’opinion jusque là favorable aux républicains avancés.
Aux élections municipales où, pour la première fois, on vote au suffrage universel masculin dans les communes, le 30 juillet 1848, les modérés et les conservateurs l’emportent presque partout. Le 20 août 1848, lors des premières élections au suffrage universel du Conseil Général, les grands notables de la Monarchie de Juillet sont de nouveaux élus.
Un nouveau préfet Touret, « républicain du lendemain », arrive à Rodez le 30 octobre. En moins d’un an pas moins de cinq préfets se sont succédés en Aveyron. Aucun n’a eu le temps de faire un travail constructif. Tous ont été entièrement occupés par la politique dans une période d’effervescence et de trouble. La Constitution est adoptée le 4 novembre.
La candidature de Louis-Napoléon Bonaparte à l’élection présidentielle est si bien accueillie en Aveyron que le préfet, nommé par le général Cavaignac, ne soutient que du bout des lèvres celui-ci.« Les légitimistes s’abstinrent, de là un nombre bien moindre de suffrages exprimés : 77 500 (environ) qu’en avril (89 329). C’est aussi pourquoi le pourcentage des voix de Louis-Napoléon fut très élevé : 88 % (68 694) dans le département de l’Aveyron, alors qu’en France il ne dépassait pas 74,2 % des suffrages exprimés. Cavaignac avait obtenu 7 110 voix et Ledru-Rollin 1 738 ce qui semblerait indiquer que, tout comme les légitimistes, un certain nombre de républicains n’allèrent pas voter[36] ».
Le candidat du parti de l’ordre, obtient un score de 88 %, score bien supérieur à sa moyenne nationale. Le préfet Touret est victime de son soutien, même retenu, au général Cavaignac. Un décret du Prince-Président du 12 janvier 1849 l’appelle à d’autres fonctions, et le préfet nommé Fluchaire vient le remplacer à Rodez.
Fluchaire, bonapartiste combatif, suivant scrupuleusement les consignes de Paris, regarde d’un très mauvais œil les républicains avancés et ne tarde pas à les mécontenter. Dès son arrivée à Rodez il rappelle à la préfecture A.Carrier, honnis par les républicains de la veille ; et y fait entrer, H. de Barrau, conseiller général, ancien légitimiste. En février 1849, les républicains organisent un banquet. Le préfet empêche cette réunion en envoyant la force armée. Il destitue également plusieurs fonctionnaires aux idées avancées.
Vu le résultat de l’élection présidentielle, et vu l’attitude des républicains comme des légitimistes lors de cette réunion électorale, les élections à l’Assemblée législative sont attendues avec impatience pour pouvoir faire le point sur les forces en présence. Elles ont lieu le 13 mai 1849. Le nombre de sièges à pourvoir est fixé à 750. En Aveyron 8 députés sont à élire. Les légitimistes et les républicains espèrent prendre leur revanche.
La campagne électorale marque nettement les oppositions. Le parti de la Rue de Poitiers regroupe en son sein : légitimistes, orléanistes, bonapartistes et catholiques. Il bat le rappel de toutes les forces conservatrices. Il possède son comité central, l’Union électorale et de nombreux comités locaux. Il se présente comme le parti de l’Ordre et décrit les républicains comme celui de la peur. Il fait paraître de nombreuses brochures accablant les socialistes et les communistes. Elles sont distribuées et reprises par la presse départementale.
Le nombre de votants est un petit peu plus fort que lors de l’élection présidentielle. Il y a en effet 79 850 votants contre environ 77 500 suffrages exprimés lors de l’élection présidentielle mais 112 000 inscrits. L’enthousiasme des premières élections est bel et bien retombé. L’abstention s’élève cette fois-ci à plus d’un quart des inscrits[37] alors qu’elle n’atteignait pas les 15% lors de l’élection de l’Assemblée Constituante en 1848.
« Les élections à l’Assemblée législative du 13 mai 1849 [ont] lieu dans un climat d’agitation sociale et de rumeurs, dominé par des manœuvres politiques du gouvernement, à la tête du Parti de l’ordre, bénéficiant du soutien de l’administration et de la participation active des forces conservatrices du pays, notamment l’Eglise [38] ».
L’élection de 1849 voit l’union des républicains contre les légitimistes et les autres conservateurs. Trois légitimistes : De Balzac (également élu conseiller général), Dalbis du Salze et l’abbé Combes sont élus. Trois hommes se reconnaissant dans le parti de la Rue de Poitiers complètent cette représentation conservatrice : les avocats Henri Rodat et Vernhette et le procureur Emile Vésin. Seul Denayrouse (avocat) et Pradié (avocat, notaire et homme de lettres) sont élus pour les républicains.
Les légitimistes sont les grands vainqueurs de cette élection. Ils font pencher la balance contre de Guizard à Espalion, tandis qu’il soutiennent Rodat à Rodez contre Carcenac. Au total, par leur habile jeu, six conservateurs sont élus. Ils font obstacle aux candidatures des « républicains modérés » et ne laissent passer que deux « montagnards » alors que ceux-ci rassemblent plus de 40% des suffrages[39]. « Malgré la triple coalition des orléanistes, des légitimistes et des bonapartistes ; malgré l’administration et ses nuées de fonctionnaires ; malgré l’influence des sacristies et des puissances financières ; malgré les fraudes sans nombre qui se sont commises ; malgré les moyens les plus honteux pour détourner les suffrages, seuls contre tous, les « rouges » ont eu 2 représentants et une minorité avec laquelle il faut bien compter …[40] ». Enfin, pour accentuer la déception et la fureur des républicains, le préfet Fluchaire profite de la déconvenue de Carcenac pour le destituer de sa fonction de maire de Rodez[41].
L’Aveyron est donc bien en phase avec le mouvement national qui voit la défaite significative des modérés[42], pourtant vainqueurs en 1848 et qui n’obtiennent que 10 % des suffrages au niveau national et ne comptent plus que 80 sièges ; et le triomphe du « parti de l’ordre » qui remporte 53% des suffrages ce qui lui assure quelques 450 sièges. La gauche radicale-socialiste ou Montagnarde, qui obtient 35% des voix et compte alors 180 élus, connaît une progression spectaculaire, ce qui ne manque pas d’attiser les craintes de tous ceux qui voient là le signe d’un avènement prochain de la masse, en Aveyron comme ailleurs. L’Aveyron y est peut-être d’autant plus sensibilisé que les « rouges » ont surtout opéré une percée significative dans les régions rurales du pourtour ouest et nord du Massif Central. Les autres espaces concernés par ce phénomène sont la France de l’Est et les départements alpins.
Ledru-Rollin, fort du résultat des élections, provoque une grande manifestation populaire contre la Chambre, le 13 juin 1849, suite à l’intervention de l’armée française à Rome contre les républicains qui aboutit « au rétablissement de l’absolutisme pontifical[43] ». La répression de cette manifestation décapite le mouvement républicain. L’armée disperse les manifestants. Ledru-Rollin s’enfuit en Angleterre.
Cette grande manifestation a suscité la peur dans les rangs de la majorité. Le parti de l’Ordre multiplie les lois réactionnaires. Pour la majorité « l’arme des lois [44] » va servir à se garantir contre les « funestes idées républicaines [45]». Les conservateurs aveyronnais vont appuyer de leurs votes des mesures réactionnaires qui affaiblissent la démocratie : l’état de siège, la suspension des journaux, la privation de l’indemnité parlementaire, l’exclusion de l’assemblée, la dissolution des gardes nationales soupçonnées d’esprit républicain, la possibilité d’interdire les clubs et autres réunions publiques. Mais malgré ces mesures, le vote en faveur des républicains reste un phénomène important.
La loi électorale du 31 mai 1850, votée à la suite de succès républicains lors d’élections partielles, restreint le suffrage universel et raye des listes près de trois millions d’hommes, la plupart ouvriers habitants des villes[46]. Cette loi exige pour être électeur un domicile de trois ans dans le canton, prouvé par l’inscription au registre des contributions indirectes ou par la déclaration du patron pour les ouvriers, du maître pour les domestiques. Elle exclut tout homme condamné non seulement pour fait de droit commun (y compris le vagabondage, l’adultère, la mendicité) mais aussi pour délit politique (attroupement, délit de presse, de club). Si sur les rangs de l’Assemblée cette loi fait grand bruit, elle n’a pas de profondes répercussions en Aveyron, où les petits exploitants agricoles et les artisans ne perdent pas pour autant le droit de vote, mais est l’objet de vives critiques de la part des républicains fort mécontents de cette mesure. Cette loi exclut de nombreux militants républicains du champ politique et accentue le recrutement des sociétés secrètes.
Comme dans 78 autres départements, le Conseil général de l’Aveyron vote, sur la proposition de Rodat[47], une motion en faveur de la rééligibilité de Napoléon. Le vote n’est acquis qu’à une faible majorité (20 voix contre 18). Les légitimistes et les républicains se sont prononcés contre cette proposition.
Le département a donc connu de nombreux bouleversements dans le domaine politique entre 1848 et 1851.
L’euphorie générale de la proclamation de la République retombe rapidement puisque dès le mois d’Avril 1848, huit des dix députés aveyronnais élus ne sont pas républicains.
Lors des élections présidentielles de décembre 1848, 88,5 % des inscrits votent pour Louis Napoléon Bonaparte.
Les élections du 13 mai 1849 viennent confirmer l’existence d’un courant démocrate-socialiste qui obtient deux sièges sur huit. Cette élection révèle la géographie politique du département. Le parti de l’ordre est solidement implanté dans l’ensemble du département. Les démocrates-socialistes réussissent leurs meilleurs scores dans les villes et dans quelques gros bourgs. La partition est bien distincte. Les communes rurales soutiennent le parti de l’ordre. Il existe quelques îlots républicains dans les communes les plus urbaines.
Cette géographie politique reste identique en décembre 1851.
Le contexte et le champ d’étude sont ainsi posés. Il est temps à présent d’en définir le cadre chronologique.
Il commence par la réunion préparatoire au coup d’état qui s’est tenue dans le cabinet de Louis Napoléon Bonaparte et se termine par le plébiscite de 1852 approuvant le rétablissement de l’Empire. On a choisi d’étudier la résistance républicaine au coup d’Etat de Louis Napoléon par zone géographique. En effet, le mouvement insurrectionnel a manqué d’unité et s’est déclenché puis déroulé de manière localisée dans quatre des cinq arrondissements. De nombreux cantons sont ainsi restés totalement à l’écart des troubles. « Si partielle qu’elle ait été, la prise d’armes des départements contre le coup d’Etat fait l’originalité de cet épisode[48]. » Il est donc préférable d’analyser un par un les foyers d’insurrection.
L’objectif de cette étude est de montrer les enjeux de l’insurrection aveyronnaise, les spécificités de celle-ci en comparaison avec les mouvements d’autres départements, mais aussi ce que sont devenus ceux qui ont été condamnés pour leur acte de résistance. Pour démontrer cela trois parties se dégagent.
La première partie présente le déclenchement de la résistance républicaine en Aveyron. La période étudiée concerne les premiers jours de l’insurrection, son déroulement dans les différents secteurs où elle est née, son évolution, les principaux faits d’armes, puis l’échec de celle-ci et la restauration de l’autorité.
La seconde partie s’étend du plébiscite des 20 et 21 décembre 1851 où le peuple français approuve dans son immense majorité l’initiative de Louis Napoléon Bonaparte à celui des 20 et 21 novembre 1852 où il accepte le rétablissement de l’Empire. Elle fait le point sur la répression qui s’abat sur les vaincus. Elle essaye de mettre en évidence la réalité et l’effectivité des condamnations. Elle met également en avant le ralliement massif de la population au pouvoir bonapartiste et la marginalisation des opposants.
La troisième partie est plus analytique. Il s’agit ici de mesurer l’ampleur de la résistance républicaine aveyronnaise et d’interpréter ces évènements : Quel est le rôle joué par les sociétés secrètes ? Qui sont les insurgés ? Quelle image l’Eglise et les conservateurs donnent des républicains et de leur action? A quels mobiles l’insurrection obéit-elle ?
[1] Vigier P., La Seconde République, Paris, P.U.F, p. 87. [2] Vigier P., op. cit., p 87.
[3] Charbonnier B, La résistance républicaine au coup d’Etat du 2 décembre 1851 de Louis Napoléon Bonaparte en Lot-et-Garonne, mémoire de maîtrise sous la direction de Bernard Lachaise et Christine Bouneau, Université de Bordeaux 3 – juin 2001. [4] Agulhon M., 1848 ou l’apprentissage de la République 1848-1852, Histoire de la France Contemporaine,
t. IX, Point Seuil, 1992, p 183. [5] Agulhon M, op. cit., p 192.
[6] Vigier P., op. cit, p 113.
[7] Huard R., « Autour de décembre 1851 », article intitulé « biographie départementale, postérieure à 1880, classée par grandes régions et départements », Revue d’histoire du XIXe siècle, n°22-2001/1, 279 p, p 127-146. [8] Balitrand, Les bonapartistes en Aveyron, maîtrise soutenue à l’U.T.M. [9] Voir en annexe n°1 la pyramide des âges de cette population. [10] Voir en annexe n°2 la carte n°1 intitulée « Carte de la population du département de l’Aveyron en 1851 ». [11] Joanne A., Département de l’Aveyron, Hachette, 1881. p 35. L’auteur fait ce constat pour 1880. Il est donc tout aussi valable trente ans plus tôt. [12] Arch. dép. Aveyron : 6 M 63.Le recensement de 1851 fait état de 390 944 catholiques romains et de 3 166 calvinistes situés surtout dans le Sud du département (principalement à Millau et à Saint-Affrique). [13] Bonafin D., Economie et finances de Rodez de 1848 à 1870, mémoire de maîtrise, 1967. Institut d’Etudes Méridionales, p 11. [14] Ibidem, citation de Duveau G., La vie ouvrière en France sous le Second Empire, Gallimard, 1946, 550 p. [15] Arch. dép. Aveyron : 6 M 63 : Véritables cœurs industriels, les grands établissements de Decazeville comptent 4 500 ouvriers en 1850, ceux d’Aubin rassemblent 3 100 personnes (plus 100 personnes pour la conception de ponts en fer pour les chemins de fer, et 100 ouvriers dans une usine de verre à vitre dans la proche localité de Viviez), et ceux de Firmi, bien plus modestes, rassemblent tout de même quelques 500 personnes. Cette importance nationale est attestée par l’intérêt que leur porte le Duc de Morny qui autorise en 1853 la concession d’une ligne ferroviaire reliant ces deux bassins à la ligne Montauban-Clermont. [16] Bonafin D., op.cit, l’auteur parle de 1 588 ouvriers en 1864, « date où le déclin se faisait sentir ». La récapitulation par profession du recensement de population de 1851 fait état de 2 043 personnes employées sous la mention de « grandes industries ou manufactures » dont 814 femmes dans les manufactures de production de tissus. [17] S’il existe des études sur cette question sur d’autres départements de Midi-Pyrénées – mémoire de maîtrise de L.Clarenc : Quelques aspects économiques et sociaux de la crise des années 1846-1848 dans les Hautes Pyrénées – aucune n’a pu être trouvé pour le cas de l’Aveyron. D.Bonafin la mentionne et donne quelques indications sur celle-ci, H. de Barrau apporte un témoignage sur ce qu’il appelle la « disette » de 1846-48. [18] De Barrau H., Galerie des préfets de l’Aveyron – t III – p 242-243. [19]Charle C, Histoire sociale de la France au XIX ème siècle, Paris, Point Histoire, 1991, 400 p. Citation p 60. [20] Ibid.
[21] Arch. dép. Aveyron : Y 139 : Registre d’écrou de la Maison d’arrêt et de correction de l’arrondissement de Rodez pour les prévenus et condamnés du 22 juillet 1846 au 9 février 1850. Dossier n°12 : une cultivatrice, condamnée a être emprisonnée 15 jours à compter du 8 août 1846 pour vol de récoltes ; n°32 : un cordonnier, condamné a être emprisonné 3 mois à compter du 2 septembre 1846 pour avoir été déclaré coupable « d’avoir sciemment recelé une certaine quantité de blé volé » ; n°33 : un cultivateur, condamné à 1 mois d’emprisonnement à compter du 3 septembre 1846 pour avoir été déclaré coupable d’un vol de poules ; n°35 : un maçon, condamné à 1 mois d’emprisonnement à compter du 4 septembre 1846 et à 16 francs d’amende pour avoir été déclaré coupable d’un vol de raves et de haricots. Tous les arrondissements sont concernés, et les condamnations sont relativement nombreuses à partir de 1846. [22] L’Echo de l’Aveyron et le Journal de l’Aveyron. [23] De Barrau H., op. cit.,t III, p 244. [24] Dans les derniers jours d’avril 1847 une attaque se produit contre un propriétaire du village de Bertholène. « Le jour de l’enlèvement des grains, il y a un grand attroupement et un grand tumulte. Des hommes et des femmes attaquent les charrettes et emportent du blé qui avait été ainsi vendu. Le pillage général n’est évité que par l’intervention du maire qui fait mettre à l’abri les grains vendus. Le lendemain, la gendarmerie de Laissac vient arrêter trois femmes accusées d’avoir joué le rôle principal dans cette émeute et elles sont conduites à la prison de Millau. Elles sont condamnées à un mois de prison par le tribunal correctionnel de Millau. [25] Le suffrage universel « masculin » date de 1848. Le suffrage véritablement universel date de 1944. [26] Démier F., La France du XIXe siècle 1814-1914, Point Histoire, 2000, p 209, cette citation s’achève comme suit : « […] crise enfin qui se développe de 1849 à 1851, liée à une tentative de république paysanne et qui trouve son issue dans le coup d’Etat de 1851 ». [27] Sorlin P., Sociétés contemporaines, Arthaud, 1961, t I, p 41. [28] Sorlin P., Sociétés contemporaines, p 41. [29] Ibid, p 42, d’après un extrait des Mémoires de Tocqueville. [30] Raginel, commissaire envoyé par le Gouvernement provisoire, vient tout droit des barricades parisiennes. Il est jugé trop excessif par les conservateurs qui obtiennent la nomination d’un second commissaire. Les deux hommes ont les mêmes compétences et ne cessent de se contredire. [31] Enjalbert H., Histoire du Rouergue, Privat éditeur, 1979, 508 p. [32] Raginel fait graver sur la façade Ouest de la cathédrale de Rodez, la devise républicaine « Liberté, Egalité, Fraternité » ( sous la rosace) Ce geste, bel exemple d’utopisme en ces débuts de l’ère républicaine, n’a pas du tout été du goût « des républicains du lendemain » [33] Jean-Joseph Tarayre, né le 21 mai 1770 à Solsac, mort le 27 novembre 1855 à Rodez. Baron d’Empire, le vieux général Tarayre, tout auréolé de la grande Légende napoléonienne, incarne l’idée républicaine. Après la chute de l’Empereur, il ne cesse de défendre, par la plume et la parole, les idées de liberté qui furent « l’idole de sa jeunesse ». [34] Cette dernière mesure explique la durée du temps imparti pour les élections. En effet, toutes les communes votant au chef lieu de canton, les unes après les autres, et selon un ordre préétabli par les Commissaires du Gouvernement, les opérations devaient nécessairement se prolonger et ce d’autant plus que le nombre de communes était grand, et que les communes étaient peuplées. Ainsi, il put y avoir des différences pour les délais de votes. [35] Il arrive en onzième position et n’obtient que 28 382 suffrages. [36] Enjalbert H., Histoire du Rouergue, p 319. [37] Selon Henri Enjalbert, elle atteint même 28,7% lors de cette élection. [38] Dictionnaire du vote, p 828. [39] Agulhon M., 1848 ou l’apprentissage de la République 1848-1852, Histoire de la France Contemporaine,
t. IX, Point Seuil, 1992, p 174. [40] Arch. dép. Aveyron : PER 180 L’Aveyron Républicain en date du 22 mai 1849. Même si les républicains n’ont que 2 élus le journal laisse transparaître une certaine satisfaction. [41] A Rodez, plusieurs incidents opposent les républicains avancés aux modérés et surtout au préfet. Carcenac ne peut se résoudre à sévir contre les républicains. Fluchaire lui n’hésite pas. Le 8 décembre 1849, à sa demande, H.Carcenac et son adjoint Labarthe sont révoqués. Par décret du même jour, Carrère, modéré, devient maire et Azémar, avocat bonapartiste, devient adjoint. Peu de temps après, H.Carcenac quitte le Conseil général où il est remplacé par son adversaire, de Rodat grâce au soutien des légitimistes. Il se retire du monde politique, après une carrière « exceptionnelle à bien des points de vue » (dixit H.Enjalbert), et meurt en 1865. [42] Démier F, La France du XIXe siècle 1814-1914, Point Histoire, 2000, p 229, F. Démier parle d’un véritable « effondrement des républicains modérés » lors de cette élection de 1849. [43] Antonetti G, Histoire contemporaine politique et sociale, P.U.F, 1991, collection Droit Fondamental, 618 p. Citation p 267. [44] Ibid, p 267.
[45] Ibid, p 267.
[46] Dirigé par Ernest Lavisse, Histoire de la France contemporaine depuis la Révolution jusqu’à la paix de 1919, Hachette, 1921. Dans le tome intitulé La Révolution de 1848 – Le Second Empire, C.Seignobos rapporte à la page 154 que : « D’après les listes officielles, le chiffre des électeurs tomba de 9 618 057 à 6 809 281 ». [47] Carcenac ayant démissionné du Conseil général, Rodat candidat l’emporte sur Cassan de Floyrac, royaliste, malgré le soutien du député Vesin. [48] Agulhon M., op. cit., p 192.
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