Philippe Vigier, historien de la Seconde République
publié dans le bulletin numéro 1, novembre 1997 Philippe Vigier, historien de la Seconde République
par Émilien Constant Notre association se doit, dans son premier bulletin, d’inclure un hommage à l’historien Philippe Vigier (1924-1995), dont l’oeuvre est en partie consacrée à nos départements alpins. Avec lui disparaît trop tôt un éminent spécialiste du XIXème siècle, principalement attaché à la Monarchie de Juillet et à la Seconde République. L’histoire de l’insurrection de décembre, qui conclut son imposante thèse de doctorat sur la Seconde République dans la région alpine, publiée en 1963 aux Presses Universitaires de France, lui doit beaucoup. Il a montré, comme M. Agulhon, que ce mouvement populaire, essentiellement rural, fut en même temps qu’une résistance armée à la violation de la Constitution et des libertés républicaines par le coup d’Etat, une tentative d’établir, et d’abord à l’échelon local, une République fondée sur la justice sociale, «la Bonne », comme on disait. Egalement attentif aux péripéties politiques, aux structures sociales et aux conjonctures économiques, Philippe Vigier, travaillant sur la longue durée dans son Essai sur la répartition de la propriété foncière dans la région alpine et son évolution de l’origine du cadastre à la fin du Second Empire (thèse complémentaire, SEVPEN 1963), met en lumière l’aspiration à la propriété des masses paysannes. De son oeuvre considérable, détachons La vie quotidienne à Paris et en province pendant les journées de 1848 (Hachette) et deux « Que sais-je ? » sur la Monarchie de Juillet et La Seconde République. Portant son analyse sur les milieux parisiens comme la France des campagnes, il donne la place qui lui revient à la vie politique locale, et marque la signification des élections municipales et cantonales, ce que ne font pas toujours les historiens «nationaux ». Historien éminent, Philippe Vigier était aussi un homme de coeur. Je l’ai rencontré en septembre 1970 à Orléans, où il m’avait invité à participer au colloque sur l’‘Esprit républicain, à l’occasion du centenaire de la Troisième République. Je l’ai vu ensuite deux ou trois fois. J’ai gardé le souvenir d’un abord simple et chaleureux, d’un verbe sonore et entraînant. Je suis heureux d’honorer ici sa mémoire. Philippe Vigier était des nôtres. Il ne sera pas oublié.
Émilien CONSTANT
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