Sixte Besson

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déposition de Sixte BESSON, cordonnier à Aups, membre de la société secrète

transcrite par Junior Culty, Cédric Jouvin, Romain Féret et Rémy Bernard, élèves de 5°3 du Collège Henri Nans à Aups (année 2000/2001)

 

Justice de paix du canton de Aups

INFORMATION n° 34

 

L’an mil huit cent cinquante deux et le quatorze janvier.

Nous Jean François Antoine Gérard, juge de paix du canton d’Aups, arrondissement de Draguignan, Var, assisté de                     greffier

Procédant, en cas de flagrant délit, par suite de notre procès verbal de ce jour.

Nous avons fait comparaître devant nous, le témoin ci-après nommé, à nous indiqué comme pouvant nous donner des renseignements sur l’organisation des sociétés secrètes et de l’insurrection ;il nous fait sa déclaration ainsi qu’il suit :

Je me nomme Sixte Besson, originaire de Moustiers cordonnier demeurant à Aups, âgé de vingt sept ans. Je fais partie de la société secrète. J’ai été reçu par le sieur Boyer. Cependant, vers la fin du mois de juillet, mon chef de section était Louis Rolland. Le vendredi au soir du 5 décembre, je me trouvai à la réunion de la société dans la maison Castellan lorsque les sieurs Isoard, Marcellin Gibelin et Emmanuel Tassy retournèrent de Salernes. En entrant dans la société, Isoard, qui était président dit : « Citoyens, l’avenir est à nous. Il faut déposer toutes les autorités et les remplacer par des nôtres. Il faut aller arrêter le courrier. Il faut envoyer dans toutes les communes des estafettes pour porter l’ordre de déposer les autorités, de prendre les armes et de venir à Aups. » Alors il écrivit lui-même trois ordres pour les présidents des sociétés de Moissac, de Baudinard et de Bauduen, et il me désigna conjointement avec Louis Rabel et Jean-Batiste Carmagnole, tous deux d’Aups, pour porter ces trois billets qu’il remit à Louis Rabel. Nous partîmes ensemble à l’heure de minuit. Nous nous rendîmes d’abord à Moissac. Nous fûmes trouver le sieur Henry Bagarry adjoint à la mairie à la campagne qu’il habite près le village et nous lui remîmes le billet qui lui était destiné. Il nous avertit qu’il allait avertir ses hommes pour les préparer au départ et qu’il allait aussi envoyer deux individus à Régusse porter le même ordre suivant l’avis contenu dans son billet. Nous nous rendîmes ensuite à Baudinard et nous remîmes au sieur Guichard président le billet à son adresse et le billet à l’adresse du président de Bauduen que Guichard se chargea de faire porter dans cette dernière commune. Guichard lui (lire nous) répondit qu’il avait reçu ces mêmes ordres et qu’il se tiendrait prêt.

Le lendemain au soir six décembre, j’ai été requis par le sieur Gibelin d’aller avec lui et conjointement avec d’autres chez Raynaud armurier pour nous emparer des armes qui se trouvaient dans son magasin et que nous fûmes déposer chez le sieur Allemand cafetier au premier étage. Après je suis allé sans armes à la rencontre des colonnes d’insurgés qui arrivaient des communes rurales. Pendant que ces insurgés stationnaient à la croix de St Honoré, arriva le sieur Gérard médecin à Bauduen qui dit qu’il apportait l’ordre de ne pas partir. Alors, le sieur Isoard, s’adressant aux gens de la commune de Bauduen, leur dit : « Prenez-vous cet homme pour bon ? Avez-vous confiance dans ce qu’il dit ? » Les gens de Bauduen répondirent oui et il fut décidé qu’on ne partirait pas malgré la protestation du sieur Alter qui opinait toujours pour le départ. Pour s’assurer de la sincérité des ordres apportés par le sieur Gérard médecin, le sieur Isoard envoya de suite deux hommes à Salernes, qui sont Maurel fils fabricant de vermicelles et François Jassaud.

Le 8 décembre à 10 heures du matin, je fus requis par Isoard d’aller me porter à l’embranchement du chemin d’Aiguines pour donner aux insurgés qui arrivaient de ce côté l’ordre de s’arrêter jusqu’à nouvel avis. J’étais avec le sieur Joseph Davers cordonnier de Ste Maxime qui travaillait chez le sieur Emmanuel Tassy. Nous sommes restés à cet endroit jusqu’au déclin du jour sans voir personne, si ce n’est le sieur Marius Latil ouvrier maçon de Salernes qui était monté sur le cheval de Gibelin et qui nous dit qu’il se rendait à Bauduen pour presser le départ.

A mon retour je fus requis par le sieur Gibelin pour faire partie du piquet qui a procédé au désarmement.

J’ai assisté à la réunion qui a eu lieu aux grottes de Ste Madeleine et dans laquelle Isoard fut acclamé président. J’ai assisté aussi à la réunion qui a eu lieu le 19 octobre à la réunion du bastidon de Marcelin Gibelin et à laquelle s’étaient rendues quatre personnes de Salernes qui sont les sieurs Cotte, André cordonnier, Dauphin perruquier, le quatrième je ne le connais pas. Ces individus se plaignaient de ce que l’on ne faisait pas assez de propagande. Le lendemain Gibelin se vantait d’avoir fait faire une bonne perruque à Isoard président. Gibelin n’avait pas un grade dans la société, mais c’était lui qui faisait le plus de propagande.

Lecture faite de sa déposition, il y a persisté et signé.