Joseph Henri Raynaud

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Déposition de Joseph Henri Raynaud, armurier à Aups

transcrite par Cora Scipion et Camille Milazzo, élèves de 5°3 du Collège Henri Nans à Aups (année 2000/2001)

 

Information n° 8

JUSTICE DE PAIX

du canton

de Aups

Raynaud Joseph Henri

serrurier armurier

à Aups

 

L’an mil cent cinquante deux et le deux janvier.

Nous Jean François Antoine Gérard juge de paix du canton d’Aups, arrondissement de Draguignan, Var, assisté de                     greffier.

Procédant, en cas de flagrant délit, par suite de notre procès-verbal de ce jour.

Nous avons fait comparaître devant nous le témoin ci–après nommé, à nous indiqué comme pouvant nous donner des renseignements sur l’organisation des sociétés secrètes et de l’insurrection. Il nous fait sa déclaration ainsi qu’il suit après avoir prêter le serment de dire la vérité, rien que la vérité.

 

Je me nomme Raynaud Joseph Henri, serrurier armurier âgé de 35 ans, demeurant à Aups.

Dans la nuit du 5 au 6 à 1h30 du matin, j’étais couché et profondément endormi lorsque je fus réveillé par le bruit des coups de poing que l’on donnait contre la porte de ma boutique. Je me levai et je parus à la croisée, je reconnus le nommé Marcelin Gibelin qui m’invitait à descendre, je descendis en effet. Quand j’eus ouvert la petite porte de ma boutique qui donne dans le corridor, le sieur Marcelin Gibelin entra et avec lui une masse d’individus au nombre de 25 environ. Je leur dis : « Que demandez-vous ? » Marcelin Gibelin et Fabre me répondirent : « Vos fusils ! » Comme je refusais de les donner, ils m’assurèrent qu’ils seraient payés.

Ce à quoi tous consentirent et ils s’emparent alors de 13 fusils que j’avais dont neuf simples et quatre doubles, une carabine de gendarme et une paire de pistolets. Parmi les individus qui me forcèrent ainsi à livrer mes fusils, je reconnus le sieur Marcelin Gibelin, Fabre machiniste, Maurel fabricant de vermicelles, Maurel dit le Gaillard, Antoine Verdeirenq, Louis Marsan d’Ampus ouvrier cordonnier chez Marius Blanc à Aups, Tité Carmagnolles* fils d’Elzéard, Villevieille le Dragon, Sixte Besson* dit le Pape de Moustiers ouvrier  cordonnier à Aups et Pancrace Fabre dit Passy qui s’empara de la carabine de gendarme et autres que je ne me rappelle pas.

Le lendemain 6, de 11 heures à midi, Marcelin Gibelin et Rabel entrèrent par la porte de derrière dans ma boutique et me jetèrent, enveloppés dans une grande pièce de toile, les fusils qu’ils m’avaient pris dans la nuit en me disant de les replacer dans le vitrage, qu’ils viendraient les prendre le soir parce qu’ils craignaient une visite de la police. Et le soir à 6 heures et demi, Marcelin Gibelin et Rabel vinrent de nouveau s’emparer de mes fusils. Ils étaient assistés d’une bande de vingt cinq individus environ parmi lesquels j’ai reconnu les sieurs Antoine Coulomb, Antoine Verdeirenq, Jourdan, Pancrace Fabre dit Passy, Sixte Besson dit le Pape, Bernard tisserant, Maurel dit le Gaillard, Peyré fils d’Honoré, Carmagnolles aîné ancien zouave, François Jassaud, Joseph Archier, François Piston dit Barral, Alexandre Blanc dit Menu et autres que je ne me rappelle pas.

Le mardi matin 9 décembre, le sieur Alexandre Jean, commandant la colonne des insurgés des Arcs, vint me requérir ma boutique et y installer des ouvriers pour ranger les armes des insurgés. Parmi ces ouvriers, il y en avait un des Arcs serrurier. Le soir du même jour, je fus requis par un autre chef de livrer ma boutique à des ouvriers fondeurs pour fondre des balles. Parmi ces ouvriers, j’ai reconnu le sieur Lambert, chaudronnier à Salernes. Ces ouvriers ont fondu des balles jusqu’à l’arrivée de la troupe qui s’est emparée de vingt cinq kilogrammes de balles qui restaient encore.

Le sieur Alexandre Jean m’ayant demandé des cheminées, lui ayant répondu que je n’en avais plus mais que je savais qu’un quincaillier en avait, lequel ne voulait pas en donner sans une réquisition, le sieur Jean ordonna de suite à quatre hommes de partir pour s’emparer de ce quincaillier et le mettre en prison.

Lecture faite au témoin de sa déposition, il y a persisté et l’a signé avec nous.

 

* Tité Carmagnolles avait été envoyé à Bauduen ainsi que Sixte Besson. Ils n’ont assisté qu’à la saisie des armes qui a eu lieu le 6 au soir.