A propos de la parution prochaine des Mémoires du Clamecycois NumaMillelot

A propos de la parution prochaine des Mémoires du Clamecycois Numa Millelot

 

 

Il est frappant de constater à quel point les témoignages à chaud furent rares sur la déportation des combattants du droit de décembre 1851, comme si le silence volontaire des victimes était venu faire écho au mutisme officiel et à la volonté d’oubli d’une population qui se sentait coupable d’avoir abandonné les républicains et la République au moment du danger.

 

Sur l’Algérie, on n’a pratiquement rien en dehors de l’ouvrage quasiment introuvable (en ligne sur ce site, NDE) de Charles Ribeyrolles, Les Bagnes d’Afrique, histoire de la transportation de décembre (Londres, Jeffs, 1853). On mentionnera encore le bref (et tardif) récit tout de finesse et d’ironie fait par Arthur Ranc de son séjour au bagne et de son évasion de Lambessa pour rejoindre Bizerte en compagnie de trois autres quarante-huitards déportés (Une évasion de Lambèse. Souvenirs d’un excursionniste malgré lui, Bruxelles, Sardou, 1877).

 

En ce qui concerne les déportés de Cayenne, le bilan n’est guère différent, puisque on ne peut guère mentionner que deux ouvrages publiés. Celui de Charles Delescluze (De Paris à Cayenne. Journal d’un transporté, Paris, A. Le Chevalier, 1869), qui traite surtout en fait de son emprisonnement en France et de la traversée de l’Atlantique, et fort peu de la situation faite aux déportés de l’île du Diable ; et celui, devenu rarissime, du républicain angevin François Attibert (Quatre ans à Cayenne. Notes de Fr. Attibert, déporté, Bruxelles, chez la veuve Verteneuil, 1859), qui ne rejoignit pour sa part la Guyane avec les condamnés de l’affaire des Mariannes de Trélazé qu’à la fin 1855, pour s’en évader dans la nuit du 13 au 14 septembre 1856.

 

C’est dire l’importance que va revêtir la prochaine publication, sous l’égide de la Société scientifique et artistique de Clamecy, des Mémoires de Numa Millelot, un des principaux dirigeants de l’insurrection clamecycoise, dont le manuscrit est conservé dans les très riches collections de la SSAC.

 

Dans ce récit que fait Millelot de l’enfer que fut sa vie quotidienne durant ses sept années de déportation en Guyane, il est notamment question à deux reprises d’Aillaud de Volx, que Millelot connut à l’île du Diable. En attendant que ces Mémoires soient disponibles dans leur intégralité, voici en avant-première pour les membres de l’Association 1851-2001, le passage consacré à la mort de cet homme pour qui Numa Millelot avait conçu le plus grand respect :

 

 » (…) trois jours plus tard, j’entrais à l’hôpital malgré la répugnance que ce seul mot m’inspirait. (…) La plupart [des malades] ne pouvait plus quitter le lit. Un garde général des Eaux et Forêts, qui s’était vaillamment conduit dans le département des Basses-Alpes, était sur son séant quand nous rentrâmes ; il semblait chercher quelque chose ;  » Mauvais signe !  » me dit-il en me pressant la main.  » Je perds la mémoire, j’égare tout ce que je touche. Puis j’ai là, en face de moi, un pauvre garçon qui me fait mal ; il vient d’avoir une crise épouvantable. « 

 

Cet homme intelligent et courageux, du nom d’André Aillaud, était de Volx. Il mourut le 12 avril 1854. « 

(Mémoires de Numa Millelot, collection de la SASC, Cahier 5, p. 24)

 

Cette publication, qui apportera sur la déportation à Cayenne un témoignage à la fois humainement bouleversant et très riche d’informations pour l’historien, sera en principe disponible fin 2003.

 

 

Michel CORDILLOT