Les Mariannes de l’Hérault
article publié dans l’Hérault du Jour du 2 juin 2004 Les Mariannes de l’Hérault par Jacques Cros C’est le titre d’une étude fort documentée effectuée par Mme Andrée Piacère et M. Jean Piacère qui résident une bonne partie de l’année à Neffiès. Elle a été publiée dans le N° 74-75 de la revue du G.R.E.C. (Groupe de Recherches et d’Etudes du Clermontais) paru en juin 1995. Le nom de Marianne, donné à la République, est dû à Guillaume Lavabre, un protestant né à Puylaurens le 2 mai 1756 qui l’a introduit dans le public avec la chanson « La garisou de Marianno » écrite en 1792. Le mot est adopté par les Républicains mais aussi par leurs adversaires qui le tournent en dérision. Suite aux recommandations de l’Abbé Grégoire, Antoine-Jean Gros réalise un tableau représentant une allégorie de la République. Elle est casquée, habillée d’une tunique courte, à l’antique, qui laisse voir un sein. Elle tient dans la main droite une pique surmontée du bonnet phrygien. Sa main gauche est posée sur un niveau de maçon, symbole d’égalité, lui-même placé sur un faisceau de licteur qui exprime la force de l’union. L’histoire du bonnet phrygien mériterait à elle seule tout un développement. Les plus anciens vestiges de ce bonnet appartiennent à Mithra, la divinité iranienne du Soleil, de l’amitié, du serment et des contrats. Le mithraïsme était la religion la plus répandue en Europe avant le christianisme. Le bonnet phrygien était porté par les esclaves affranchis puis par les galériens et les marins de la Méditerranée et enfin par les Révolutionnaires de 1789. Le 20 juin 1792, alors que la foule envahit les Tuileries, il est présenté au Roi au bout d’une pique par un certain Mouchet, officier municipal. Ne sachant comment réagir, Louis XVI s’en coiffe ! Mais revenons à notre sujet : les Mariannes de l’Hérault. Notre département compte actuellement 52 de ces monuments en place publique : 35 en pied et 17 bustes. Avec l’Aude il est l’un des mieux achalandés en la matière ! La première commune de L’Hérault qui décide d’ériger une Marianne est Marseillan. La statue, œuvre du sculpteur Taillefer, payée par souscription, est inaugurée le 1er novembre 1878. Foulant au pied la fleur de lys, la Marianne de Marseillan est considérée comme la plus ancienne de France La situation politique à Marseillan à cette époque mérite qu’on s’y attarde. En 1846 une société républicaine secrète de Carbonari y est solidement implantée puisqu’elle compte plus de cent adhérents. Aux élections de 1848 un de ses affiliés, Henri Maffre, est élu conseiller municipal. Il tente, sans succès, d’impulser une action sociale contre la vie chère par la suppression de l’octroi. Les événements de 1851 marquent la commune. Henri Maffre s’en trouve maire en 1871 mais est destitué en 1873 par le gouvernement d’Ordre Moral. Il retrouve sa place de premier magistrat en mai 1876 et est confirmé à ce poste lors des échéances de janvier 1878. C’est sous son autorité qu’une délibération du conseil municipal en date du 7 février 1878 décide qu’une statue sera érigée Place de la Mission, rebaptisée Place de la République. Les auteurs de l’étude distinguent les œuvres originales, en pierre, des œuvres de série. Le nombre de ces statues en pierre n’est que de 3. Elles sont à : Marseillan, Montblanc et Lieuran les Béziers. Celle de Montblanc, exécutée par Jacques Villeneuve rappelle la Marseillaise de Rude. Elle brandit un étendard criblé de balles et foule aux pieds l’Ignorance aux yeux bandés. Parmi les œuvres en bronze 3 ont disparu. Ce sont celles d’Agde, d’Aniane et de Paulhan.. Elles ont été fondues pendant la Deuxième Guerre Mondiale. Pour les œuvres de série les auteurs recensent : 10 Mariannes « au flambeau », 8 « à la pique », 8 « à la Paix », 4 « aux Droits de l’Homme ». La Marianne de Puisserguier est de ce dernier style. Celle de Pézenas a retrouvé, à l’occasion du bicentenaire de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, ses « Droits de l’Homme » originels qui lui avaient été enlevés ainsi que le foudre jupitérien auquel avait été substitué, sous l’Etat Français, une plus raisonnable couronne de lauriers. Il faut dire que sous Pétain la chasse aux symboles républicains était la règle. On peut d’ailleurs mesurer la modération de certaines municipalités républicaines dans le choix des attributs de leur Marianne. Ici par exemple le bonnet phrygien laisse la place à un diadème. A Nizas l’allégorie de la République est une déesse gréco-romaine, mi-Diane, mi-Artémis. A Lunel c’est une réplique de la statue de la Liberté due à Bartholdi qui tient lieu de Marianne. Les Mariannes de la Paix sont caractérisées par un bouclier posé à la droite de la statue. Celles de Neffiès, de Bessan (dont l’histoire ne manque pas de rebondissements !) sont dans ce registre. Les sculpteurs sont souvent anonymes et parfois illustres. Thézan les Béziers s’était offert les services de J.A. Injalbert pour la réalisation du buste qui surmonte un haut piédestal faisant office de fontaine publique. La dernière représentation de la République installée l’a été à Gignac en 1967. Œuvre de Raymond Verdu, qui habitait Causses et Veyran, il s’agit d’un buste qui remplace une Marianne endommagée par un camion.
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