Pierre Boniface

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Déposition de Pierre Boniface, brigadier de gendarmerie à Aups

transcrite par Rémi Doze, Julian Ricordeau et Anthony Vigne, élèves de 5°3 du Collège Henri Nans à Aups (année 2000/2001)

 

JUSTICE DE PAIX

du canton de Aups

Déposition de Boniface

Brigadier de Gendarmerie à Aups

INFORMATION n° 33

        

L’an mil huit cent cinquante deux et le quatre janvier. Nous, Jean-François Antoine Gérard, juge de la paix du canton d’Aups, arrondissement de Draguignan, Var, assisté de             greffier.

Procédant, en cas de flagrant délit, par suite de notre procès-verbal de ce jour.

Nous avons fait comparaître devant nous, le témoin ci-après nommé, à nous indiqué comme pouvant nous donner des renseignements sur l’organisation des sociétés secrètes et de l’insurrection ; il nous a fait sa déclaration ainsi qu’il suit après avoir prêté le serment de dire toute la vérité rien que la vérité.

Je me nomme Boniface Pierre brigadier de gendarmerie à Aups âgé de 47 ans.

Le lundi 8 décembre me trouvant chez moi au moment où la première bande d’insurgés arrivait à Aups, je voulus descendre. Quoique me trouvant seul à la caserne et ayant ma femme dangereusement malade, je trouvai en dehors de la caserne sur le seuil de la porte deux factionnaires qui m’intimèrent l’ordre de rentrer. Comme je leur demandai de quel droit ils me défendaient de sortir de chez moi, ils me répondirent que c’était au nom du peuple souverain et ils ajoutèrent que je serais fusillé si je n’obtempérais pas à leur invitation. Le lendemain 9 décembre, aucun des insurgés ne pénétra dans la caserne. Ils se contentèrent de prendre possession de l’écurie et y logèrent les divers chevaux qu’ils mirent en réquisition dans le pays. Ils s’emparèrent du mien qui fut monté dans la nuit par un insurgé portant un costume de spahis, se disant aide de camp du général Duteil. Le lendemain matin, le cheval fut de retour à l’écurie. Étant descendu pour le voir vers les sept heures du matin, je fus présent au moment où le sieur Armelin André prit un autre cheval et le monta pour aller porter une dépêche à Fox-Amphoux. Dans la matinée du 10 décembre,  15 ou 20 insurgés armés envahirent le vestibule de la caserne. Un seul, que je n’ai pas connu, monta à mon bureau et s’empara de toutes mes armes : un mousqueton avec sa baïonnette, deux pistolets, mon sabre et ma giberne. Ce même individu en descendant, monta mon cheval et sortit. J’ai su depuis qu’il avait pris la route de Vérignon. Quelques instants après, deux individus sans armes dont l’un était le nommé Guichard de Baudinard, l’autre je ne l’ai pas connu, vinrent me prendre 60 cartouches que j’avais et vérifièrent toute la caserne pour savoir s’il ne s’y trouvait plus d’armes.

Parmi les individus qui attendaient dans le vestibule avec leurs armes, je reconnus le nommé Guieu Isidore, adjoint de la commune de Baudinard. Le nommé Guichard, dont j’ai parlé tout à l’heure, me prit à part après s’être emparé de mes cartouches et m’engagea à me sauver me disant que ma vie était en danger. Je lui répondis que cela me serai difficile puisque la caserne était cernée et le vestibule rempli d’hommes armés. Depuis cet instant, je restai chez moi jusqu’à l’arrivée de la troupe.

Lecture faite de sa déposition au témoin, il y a persisté et l’a signée avec nous.