Quelques éléments locaux retenus pour la conférence donnée à Entrecasteaux le 16 avril 2011 par Frédéric

Cette page présente seulement quelques éléments locaux retenus pour la conférence donnée à Entrecasteaux le 16 avril 2011 par Frédéric Negrel. Vous voudrez bien en excuser l’écriture.

 

Quelques éléments sur la résistance de décembre 1851 à Entrecasteaux

 

 

Vous avez certainement remarqué le monument d’Aups édifié en 1881 « à la mémoire des citoyens morts en 1851 pour la défense des lois et da la République ».

Entrecasteaux a participé au financement de ce monument : les victimes de la répression ont décidé de verser le dixième de leur indemnité de 1881 à la souscription du monument et réservent une part de la somme pour la bibliothèque scolaire. « L’hommage aux Morts passe par le soutien aux vivants, avenir de la République. » (René Merle).

Lors de l’inauguration du monument, une couronne « les victimes de 51 d’Entrecasteaux au martyr du 2 décembre » y est déposée. Elle est aujourd’hui visible dans le mausolée.

 

Le 29 octobre 1848, une chambrée est dissoute à Entrecasteaux car on y a exhibé un drapeau rouge (en fait un drapeau tricolore enroulé).

Le 30 novembre 1850, la chambrette St Blaise est dissoute car Arambide y a été reçu et l’a fait abonner au démocrate du Var.

La chambrette Ste Anne est dissoute le 7 février 1851 car on y a tenu des discussions politiques et reçu des étrangers.

Le 3 mai 1851, les deux sociétés St Blaise et Ste Anne, dissoutes par arrêtés préfectoraux, se sont reconstituées sous un autre nom et dans un autre local ; des scellés avaient été posés.

Marcellin Bech, instituteur privé, secrétaire de mairie, était de St Blaise, un des chefs du parti socialiste ; Dominique Cartier et Joseph Flandin en étaient membres.

La chambrée de St Antonin compte 17 à 18 membres.

 

Le 22 mars 1851, le président de la République révoque le maire Etienne Jassaud, élu en 1848, à la suite de son opposition à la dissolution de la chambrette Ste Anne.

Le conseil municipal a beau traîner des pieds plusieurs semaines, il est finalement remplacé par Etienne Bernard, qui se compromettra dans la résistance. Après décembre, il sera remplacé par le boulanger Jacques Rouvier.

 

Il y a une société secrète à Entrecasteaux, une des rares dans le Var à avoir été poursuivie avant décembre 1851.

Le 4 octobre 1851, le procès contre les sociétés secrètes de Carcès et d’Entrecasteaux se solde par un non-lieu.

Dans l’instruction, on apprend qu’elle compte 11 sections de 10 membres. Le chef suprême est Ledru-Rollin.

Dans un témoignage recueilli en juillet 1851, on apprend quelques aspects de la cérémonie de réception, assez originale : « Je jure de donner la mort au traître qui par faiblesse divulguerait le complot. » L’initié est menacé par des armes, dans une cave, au bord d’une tombe. Les mots d’ordre sont : « Fermeté ! Qui est ton père ? Crie ! Qui est ta mère ? Terre ! » La société doit préparer une insurrection.

 

Les réunions sont rares : il y en a une près de la chapelle Ste Anne en juillet durant la procession vers cette chapelle.

Beaucoup de réceptions datent de l’été 1851, en particulier pendant la foire de St Sauveur par Zacharie Mireur, mineur de Carcès (qui sera condamné à l’expulsion car président de société secrète), et par un Lorguais.

Le menuisier Etienne Bech (conseiller municipal) était président.

La société de St Antonin comptait 28 ou 29 affilés.

 

Le samedi 6 décembre, des gens de Salernes sont venus appeler pour partir sur Draguignan.

On arrive à la mairie vers les 11h pour prendre les 17 fusils au nom du Peuple souverain.

On établit un corps de garde dans le local de l’école communale, on place des postes sur les routes pour arrêter les étrangers au nom du Peuple souverain afin d’assurer la mobilisation et stopper les communications des espions complices du coup d’Etat.

Et surtout on cherche des armes.

Dominique Cartier conduit un petit groupe au château de M de Lubac pour y prendre les armes. (de Lubac avait demandé la dissolution de la chambrette Ste Anne). Au passage, on demande à deux femmes de venir pour rassurer les domestiques du château qui connaissaient leurs voix ; perquisitionnant, on n’y trouva qu’un fusil et un sabre.

On va prendre les armes dans les campagnes des gros propriétaires comme M. Sillas à St Antonin, et recruter pour marcher les ouvriers (à Mentone, à Masseboeuf). On chante des chansons patriotiques (la Marseillaise, le Chant du départ) ; « Citoyens, au nom du peuple souverain, je vous ordonne de faire votre devoir. »

Il faut aussi de la poudre : le maire Bernard donne le samedi soir à Dominique Cartier trois paquets de poudre.

On remit un reçu au buraliste pour la poudre.

 

Ce samedi 6 au soir, St Antonin arrive à Entrecasteaux et repart le dimanche. Le dimanche soir on vient les rechercher : On sonne le tocsin : il y aura 40 départs de St Antonin.

 

Le dimanche 7 décembre, on nomme une commission de 6 membres qui devait s’emparer de la mairie et remplacer le maire ; mais ce projet ne s’exécuta pas.

Le même jour, Entrecasteaux envoyait estafette sur estafette à Carcès, ordonnant aux chefs rouges de s’emparer de la mairie sinon ils viendraient avec 900 hommes, menaçait-on.

Vers 4 h du soir, arrivèrent par la route de Sillans, au son du tambour, 25 gens de Fox-Amphoux qui montrèrent au maire une lettre datée de Barjols signée Trotobas, sous-commissaire, portant qu’ayant reçu des ordres de la sous-préfecture de Brignoles sur le danger de la Patrie, il leur était enjoint de partir de suite.

Mais au même instant arrive par route de Cotignac 4 ou 500 hommes de Barjols, La Verdière, Varages… et du canton de Rians, vêtus de blouses et avec deux drapeaux rouges, porteurs du même ordre, conduits par Charles Edouard de la Blaque, dit le Prince ; on va les loger dans les différentes chambrées et chez les membres des chambrées ; aucun désordre n’est signalé.

 

Le lundi 8 décembre, le départ pour Aups a lieu vers 8h. Pour Aups car entre-temps, la colonne venant du Luc, La Garde-Freinet et Vidauban a bifurqué. Ce n’est plus Draguignan l’objectif, mais les Basses-Alpes.

La colonne barjolaise s’était accrue des Entrecastelins soit un total de 700 résistants.

Nous avons une liste de 155 personnes d’Entrecasteaux (dont 136 paysans) qui ont pris la route ce 8 décembre (d’autres disent de 2 à 300)[1]. Il y alors 1930 habitants à Entrecasteaux.

On tente de s’organiser : Gustave Simon, officier de santé, étant absent, on s’est présenté chez lui pour le faire partir comme chirurgien de la colonne ; un ancien militaire, Vincent Roëre, est chargé de commander le contingent d’Entrecasteaux.

« Arrivés à Salernes nous reposâmes que quelques instants et on nous plaça sous le commandement d’Alter qui nous conduit à Aups. »

Cette fois-ci la colonne d’Entrecasteaux n’est plus avec Barjols mais avec Les Arcs (600 résistants) et arrive à Aups vers 2 h du soir.

Les Dracénois Alter et Brunet s’emparent de la mairie d’Aups à leur arrivée, avec les Entrecastelins.

Ils sont logés à Aups le lundi soir chez l’habitant, souvent un membre de la famille.

 

Le soir du mardi 9 décembre, les Entrecastelins sont dirigés sur Fox-Amphoux. Il n’y a plus de place pour loger à Aups.

« Nous partîmes à Fox sous le commandement de Jean Alexandre, des Arcs. »

 

Le matin du mercredi 10 décembre, 150 à 200 hommes armés de fusils, dont des Entrecastelins, se rendent au château Bernardesc (propriété de M. Roubaud). On y va faire des réquisitions de vivres car les garde-mangers des Foxois ne suffisent pas à nourrir toute cette troupe. Mais « En cette saison Monsieur n’y est pas » (il habite Cotignac). Ils cherchent armes et poudre : il n’y en a guère. Ils prennent des bouteilles de vin. Des cigares aussi ; dans le bureau de M de Roubaud. Un pillage diront plus tard les zélateurs du coup d’Etat ; mais nous avons un bel exemple de leur honnêteté : on a trouvé 115 fr sur le bureau. Un Entrecastelin va remettre cette somme conséquente (3 mois de salaire) au fermier de la propriété, en faisant un reçu.

En sortant du château, on entend la fusillade qui vient d’Aups, et là c’est la débandade, on s’enfuit on veut rentrer chez soi malgré les menaces des Arcois qui veulent tirer sur les déserteurs.

 

12 Entrecastelins sont condamnés à la surveillance :

Joseph Arnoux, cultivateur, 19 ans, né à Lorgues, grâce du 6 août 1854

Joseph Bech, dit Bénéchier, cultivateur, 53 ans, grâce du 6 août 1854

Jean-Baptiste Bernard, cultivateur, 22 ans, grâce du 6 août 1854

Fortuné Brunet, cultivateur, 21 ans, grâce du 6 août 1854

Louis Blanc, cultivateur, 45 ans, grâce du 6 août 1854

Barnabé Estève, bourrelier, 46 ans

Casimir Flayosc, cultivateur, 29 ans, grâce du 6 août 1854

Joseph Flayosc, cultivateur, 30 ans, figure sur l’état des hommes dangereux du 23 octobre 1855

Honoré Lambert, cultivateur, 38 ans, grâce 6 août 1854

Désiré Maurel, cultivateur, 19 ans, grâce du 6 août 1854

François Marcel, dit la Croix, cultivateur, 48 ans

Julien Vidal, cultivateur, 50 ans

 

16 sont condamnés à l’internement :

Jean-Baptiste Honoré Abbat, cultivateur, 50 ans, grâce du 6 août 1854

Jean-Bapstiste Bech, contumace

Eugène Bech dit Baron, tonnelier, 24ans

Jean-Bapstiste Bech, cultivateur, 58 ans, grâce du 6 août 1854

Alexandre Bech, cultivateur, 35 ans, grâce du 6 août 1854

Ferdinand Bernard dit Bernardin, cultivateur, 35 ans

Honoré Burle, tisserand, 60 ans

François Flayosc, cultivateur, 26 ans

Louis Ganzin, cultivateur, 21 ans

Frédéric Giraud, boucher, 22 ans, grâce du 6 août 1854

Frédéric Gourrand, 30 ans, cultivateur

Célestin Lombard, cultivateur, 47 ans, grâce du 6 août 1854

François Laugier, cultivateur, 54 ans

Louis Lombard, cultivateur, 22 ans

Casimir Marcel, cultivateur, 19 ans, grâce du 6 août 1854

Jacques Simon, cultivateur, 29 ans

 

2 condamnés à l’éloignement du territoire

Dominique Cartier, pour 3 ans, contumace

Louis Roux dit le Saint, pour 3 ans, contumace, commué en surveillance le 29 septembre 1854

 

20 condamnés à Algérie moins dont 7 sont partis

François Siffren André, cultivateur, 34 ans, commué en surveillance le avril 1852, grâce du 6 août 1854

Jean-Baptiste Audibert, né à Carcès, maréchal-ferrant, commué en surveillance le 16 avril 1852, puis placé en internement le 4 mars 1853

Célestin Brochier, cultivateur, 24 ans, commué en surveillance le 16 avril 1852, grâce provisoire le 1er décembre 1854, grâce entière le 1er décembre 1856

Joseph Bernard, cultivateur, 38 ans, commué en surveillance le 16 avril 1852, grâce du 6 août 1854

Joseph Brunet fils de Sauveur, 36 ans, déporté à Bourkika, décédé à Marengo le 29 mai 1852

Charles Christophe, perruquier, 19 ans, commué en surveillance 16 avril 1852, grâce du 6 août 1854

Joseph Estelle, cultivateur, 47 ans, commué en surveillance le 16 avril 1852, grâce du 6 août 1854

Antoine Flayosc, cultivateur, 40 ans, déporté à Bourkika, commué en internement dans le Puy de Dôme le 21 janvier 1854, puis en surveillance le 6 août 1854

Joseph Flandin, chaudronnier, 43 ans, veuf, 4 enfants, déporté à Birkadem, décédé à Alger le 7 juillet 1852

Esprit Féraud, tisserand, 35 ans, commué en surveillance 16 avril 1852

Joseph Gaurrand, cultivateur, 21 ans, déporté à Bourkika, grâce du 4 février 1853

Marius Gaurrand, 25 ans, cultivateur, né à Lorgues, déporté à Bourkika, grâce du 4 février 1853

Augustin Guigou, cultivateur, 29 ans, déporté à Bourkika, commué en surveillance le 3 décembre 1853

Justin Lombard, cordonnier, 36, commué surveillance le 16 avril 1852

Frédéric Hilarion Joseph Luquet, cultivateur, 25 ans, réfugié en Italie, surveillance au retour après juin 1852, grâce 4 février 1853

Jacques Lombard, cultivateur, 25 ans, commué en surveillance le 16 avril 1852, grâce du 6 août 1854

Jacques Joseph Marcel, cultivateur, 30 ans, commué en surveillance le 16 avril 1852, grâce du 6 août 1854

Joseph Marcel dit Tranquille, vannier, 25 ans, commué en surveillance le 16 avril 1852

François Siéyes, boucher, 30 ans, commué en surveillance le 16 avril 1852, grâce du 4  février 1853

Jean Louis Siéyes, cultivateur, 25 ans déporté à Aïn Benian, grâce du 4 février 1853

 

2 condamnés à l’Algérie plus, effectivement partis

Pancrace Flandin, cultivateur, 42 ans, déporté à Pont du Cheliff, commué en surveillance le 30 avril 1853, grâce du 13 mai 1856

Vincent Roère, cultivateur, 55 ans, déporté à Pont du Cheliff, interné dans la Drôme le 23 février 1854 mais il n’y va pas, commué en surveillance le 13 janvier 1855

 

Dominique Cartier, Louis Roux dit le Saint, Joseph Marcel dit Titon, JB Bech dit Luyar ( ?) sont en fuite

 

On notera également que Jacques Bernard, ménager du Luc, né vers 1798 à Entrecasteaux, est décédé le 20 avril 1853 à Douera.

voir aussi : Pensionnés de 1851 à Entrecasteaux


[1] Le lundi matin, une partie d’Entrecasteaux (15), en retard, se joint, avant Salernes à une colonne de Barjols, Varages et la Verdière.