DEPOSITION de RICARD Etienne Adrien Justinien Xavier

document communiqué par Jean Jarry

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DEPOSITION de RICARD Etienne Adrien Justinien Xavier, propriétaire à Saint-Maximin, le 21 janvier 1852 devant le juge FRESQUIERE Pierre François.

[…]…je n’ai donné en aucune manière ma démission de commandant de la Garde Nationale parce que je n’avais nullement à la donner à une autorité que je ne connaissais pas.

   Le 5 décembre dernier deux heures après la possession de l’hôtel de ville par les insurgés, j’appris qu’une publication faite au nom du maire insurrectionnel invitait les gardes nationaux à se rendre sur la place de l’hôtel de ville pour y élire leur commandant.

   Le soir vers 8 à 9 heures, je sortis de chez moi avec mon frère, pour aller voir Me HONNORAT notre maire ; en traversant la place de l’hôtel de ville ; j’entendis un bruit de tambour et de musique qui arrivait par la Grand-rue. Une colonne d’hommes armés et non armés arriva en même temps sur la dite place ; ce qui me décida à m’arrêter pour voir ce qui allait se passer.

   A son arrivée sur la place, cette foule compacte se porta vers la porte d’entrée de l’hôtel de ville. La musique joua La Marseillaise ; je quittai les lieux immédiatement après et j’appris plus tard que Joseph GASQUET[1] avait été acclamé commandant de la Garde nationale.

   Je dois vous faire observer que depuis fort longtemps je n’avais eu avec le sieur  J. GASQUET ni rapport ni entrevue. Ce ne fut que le sur lendemain de l’insurrection le 7 décembre que me trouvant au devant de l’hôtel du Var, je fus accosté par GASQUET qui me demanda ce qu’étaient devenus les fusils qui ne se trouvaient pas dans la salle d’armes de l’hôtel de ville, en ajoutant qu’il régnait de l’agitation à cet égard et que l’on accusait hautement le maire Honnorat de l’enlèvement de ces armes, il me pria en conséquence d’aller chez Me Honnorat, parce que, disait-il, il était bien aise d’empêcher que rien de désagréable ne lui arrivât quant à ce …En effet, je me rendis chez Me Honnorat qui m’apprit qu’il avait chez lui quelques-uns de ces fusils et que les autres étaient chez l’armurier en réparation et qu’on pouvait venir les prendre.

   Le 5 décembre, je sortis de chez moi vers onze heures du matin, je me rendis comme d’habitude sur la place Malherbe. Demi heure après, Me Honnorat maire vint m’y joindre pour me faire part de l’intention que les démagogues avaient de s’emparer de la mairie. Je me rendis avec le fonctionnaire à l’hôtel de ville et tous mes efforts échouèrent devant l’insurrection à cause du grand nombre d’étrangers qui étaient venus grossir la phalange révolutionnaire.

   Après l’envahissement de la mairie, il était alors quatre heures du soir, je sortis avec Me Honnorat, je l’accompagnai chez lui et en rentrant chez moi, je trouvai la colonne insurrectionnelle devant ma maison, ayant à sa tête le sieur MOULET père[2] ceint de son écharpe qui me déclara qu’il venait me réclamer le drapeau dont j’étais dépositaire.

   Je me vis encore cette fois-là obligé de céder devant la force. En le lui remettant, je ne pus m’empêcher de dire à MOULET que le drapeau était sans tache et que sous peu il aurait à le rendre.

Quant au sieur Romuald LIVON, je dois dire qu’il a fait tous ses efforts pour arrêter le mouvement insurrectionnel dans la journée du 5 décembre. Il est de plus à ma connaissance que le sieur LIAUTARD Louis serrurier était du nombre de ceux qui en ma présence cherchaient à apaiser l’effervescence.



[1] Joseph Lucien GASQUET, né vers 1803 à St Maximin, receveur buraliste, nommé maire insurrectionnel et commandant de la Garde nationale, décédé le 26 janvier 1858 à Marseille.

[2] Pierre Jean Joseph MOULET, né le 14 mai 1800 à St Maximin, marchand de bois, chef de la société secrète et principal initiateur à St Maximin, Nans, Pourcieux, Ollières, exil volontaire à Nice, puis en Espagne,  décédé le 11 décembre 1871 à Nice.